Le quotidien de l'Alfama se vit dans la rue. Il se dégage de cette détermination au vivre ensemble un sentiment de vie et d'harmonie. Rarement un quartier d'une ville donne au visiteur une telle impression d'habitation.
Pas besoin de franchir le palier d'une porte pour entrer chez quelqu'un : l'Alfama appartient à ses habitants, des pavés aux toits. On croise beaucoup de regards aux fenêtres.
Les habitants vivent à un rythme paisible et lent, donnent l'impression de tous se connaître, et ont un désir profond de vivre dans l'entraide.
Après des heures glorieuses, les nobles familles ont peu à peu quitté le quartier pour aller vivre plus à l'ouest, dans des zones moins exposées aux séismes, nombreux sur cette côte. Les pêcheurs et les pauvres ont alors envahi le quartier et lui ont donné l'âme que l'on y trouve aujourd'hui. Malheureusement, un peu mise à l'écart, l'Alfama se délabre peu à peu.
De nombreuses maisons deviennent inhabitées : coincée entre le désir de classer la ville au Patrimoine mondial de l'UNESCO (ce qui implique de rigoureuses et coûteuses règles de rénovation) et son manque de moyen, la municipalité est contrainte à l'immobilisme et toujours plus de gens s'en vont.En Juin, l'Alfama fête Santo Antao. Les rues sont décorées de guirlandes colorées, sur la moindre petite place apparaissent barbecues, tables et buvettes. Sur le mur de la photographie de droite, on peut lire « le PSD travaille à la réhabilitation de votre quartier ».
L'on y mange surtout des grillades de poisson : sardines et morue, spécialité nationale. Tout est préparé dans la bonne humeur, la terrasse tout simplement montée sur un bout de route en face du restaurant.
C'est l'occasion pour les voisins de se réunir dans la rue, enceintes tournées vers l'extérieur, et d'échanger quelques pas de danse. J'ai appelé cette photo La Danse des Édentés. La santé buccale est souvent un bon indicateur du niveau de vie.
Après avoir serpenté dans les ruelles étroites et montantes, fait deux fois trois fois demi-tour et emprunté des escaliers aux marches irrégulières, le marcheur lent découvrira peut-être un mirador, et une vue resplendissante.
L'on sent alors encore un peu mieux quel vent souffle sur l'Alfama, et, les yeux longuement rivés sur les toits des maisons et sur la mer, l'on comprend, le cœur allégé, quelle éternité fait son terreau.
« l'amour et la nostalgie (1) sont fidèles à la liberté »
2 réactions
1 De Renaud M. - 19/12/2011, 15:51
Saudade, aussi, en hommage à la « Diva aux pieds nus », Cesária Évora, chanteuse capverdienne (et donc de culture portuguaise) morte samedi dernier.
2 De Gilles - 19/12/2011, 20:29
Superbe !