Je m'attarde - Mot-clé - Brésil le temps d'un souffle<br />2024-03-25T15:05:00+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearAcabou Chorare, de Novos Baianos (1972)urn:md5:20efa46861b9ffb8c1dbe1720b56dbb72023-07-28T18:07:00+02:002023-07-28T17:10:45+02:00RenaudMusique1970sBossa novaBrésilSamba <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/MUSIQUE/novos_baianos/.acabou_chorare_m.jpg" alt="acabou_chorare.jpg, juil. 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<p>Il y a chez les <strong>Novos Baianos</strong> une simplicité dans les mélodies qui m'avait fait défaut sur l'<a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Getz-Gilberto-de-Stan-Getz-Joao-Gilberto-1964">album éponyme</a> de <strong>Stan Getz</strong> et <strong>João Gilberto</strong> — pour rester dans le thème Samba / Bossa nova des musiques brésiliennes, ce dernier ayant été un peu leur parrain. Pas du tout de Jazz ici, mais des variations autour du registre identifié comme "Musique populaire brésilienne", avec des passages très électriques (<strong>Moraes Moreira </strong>use du fuzz comme un <strong>Hendrix </strong>sur certains morceaux comme Tinindo Trincando), d'autres presque enfantins (le morceau Acabou Chorare, beaucoup moins ma came). L'apport de <strong>Baby Consuelo </strong>au chant est délicieux. L'album respire le bonheur, la jeunesse ensoleillée, les rêves et les désirs... Des morceaux comme Preta Pretinha et Brasil Pandeiro sont très caractéristiques du ton, contagieux, qui arbore une forme de douce naïveté éloignée de toute forme de niaiserie.</p>
<p>Extrait de l'album : Preta Pretinha.</p>
<div id="centrage"> <iframe width="560" height="315" src="https://www.youtube.com/embed/0FVPQzKw9bk" frameborder="0" allowfullscreen></iframe> </div>
<p>À écouter également : <a href="https://youtu.be/4vL--PrvsJ0">Brasil Pandeiro</a>, <a href="https://youtu.be/9HRX3SMy8FE">A Menina Dança</a>, <a href="https://youtu.be/mQBcYj84MHg">Swing De Campo Grande</a>.</p>
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/MUSIQUE/novos_baianos/.novos_baianos_m.jpg" alt="novos_baianos.jpg, juil. 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Acabou-Chorare-de-Novos-Baianos-1972#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1194Getz / Gilberto, de Stan Getz & João Gilberto (1964)urn:md5:551b7222b8231fa8810b641c2104cc9f2023-06-25T16:28:00+02:002023-06-25T15:31:27+02:00RenaudMusique1960sBossa novaBrésilSamba <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/MUSIQUE/stan_getz/.getz_gilberto_m.jpg" alt="getz_gilberto.jpg, juin 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<p>Il y a parfois un léger parfum de caricature de Jazz brésilien, tendance Bossa nova / Samba, qui se dégage en écoutant cet album qui porte le nom du duo <strong>Getz </strong>/ <strong>Gilberto</strong>. Sans doute un peu la faute à <strong>Chabat </strong>/ <strong>Darmon </strong>dans <ins>La Cité de la peur</ins>... C'est très agréable cependant, avec des grands standards comme The Girl From Ipanema (difficile pour le reste de l'album de passer après le morceau introductif) ou Corcovado, des combos très simples (sax, guitare, piano, batterie, sans oublier la participation au chant de <strong>Astrud Gilberto </strong>sur quelques morceaux). L'ensemble coule avec un naturel confondant.</p>
<p>Triste coïncidence, la chanteuse <strong>Astrud Gilberto </strong>est morte il y a quelques jours.</p>
<p>Extrait de l'album : Corcovado.</p>
<div id="centrage"> <iframe width="560" height="315" src="https://www.youtube.com/embed/UJJKDzqVpvE" frameborder="0" allowfullscreen></iframe> </div>
<p>À écouter également : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=sx0TLkdWFEU">The Girl From Ipanema</a>.</p>
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/MUSIQUE/stan_getz/.getz_live_m.jpg" alt="getz_live.jpg, juin 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Getz-Gilberto-de-Stan-Getz-Joao-Gilberto-1964#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1183Gog Magog, de Patrícia Melo (2021)urn:md5:a54782e96f0ca016a358686cf2a957932023-06-07T15:48:00+01:002023-06-07T15:48:00+01:00GillesLectureAcoustiqueBrésilCrimesEducationNuisancePolarPrisonProcèsSon <div><img style="margin: 0 auto; display: block;" src="https://www.je-mattarde.com/public/GILLES/LIVRES/.Gog-Magog_Patri_cia-Melo-2021_m.jpg" alt="" /></div>
<p>Ce court roman commence comme une nouvelle à chute : </p>
<blockquote><p>Je n'ai pas l'oreille absolue comme certains musiciens, ni l'ouïe sensible comme celle des chiens, mais je n'ai jamais compris pourquoi le bruit n'est pas considéré comme une arme blanche efficace.
Un éclat de rire comme celui qui vient de l'étage du dessus, en rafales hystériques, aiguës, au milieu de la nuit, a aussi le pouvoir de blesser, pensai-je, au réveil. Pas comme le pistolet, le couteau ou la corde. Son effet ressemble plus à celui de certains poisons qui ne nous tuent pas mais détruisent notre santé. Ils pourrissent notre foie. Ils dérangent notre esprit. </p>
</blockquote>
<p><em>Le cœur révélateur </em>et <em>Le chat noir </em>d<strong>'Edgar Allan Poe</strong> vous reviennent peut-être comme des représentations intérieures bien ancrées. <ins>Gog Magog</ins> dont le titre réfère à des figures de la mythologie n'est pourtant pas une histoire au ressort fantastique. Le récit de ce professeur de biologie nous plonge dans le réalisme social jusqu’aux oreilles. C’est l’histoire d’une haine entre voisins dans un immeuble de São Paulo. <strong>Patrícia Melo</strong> dépeint avec une causticité évidente l'infernale supplice de son anti-héros, et par là même, la paupérisation des enseignants au Brésil. </p>
<blockquote><div>L'amour, pour les esprits cartésiens, est toujours ridicule. Pour la science, il s'agit d'un torrent de phényléthylamines. De hauts niveaux de dopamine et de norépinéphrine. Des phéromones, pour celui qui y croit.
Pour moi, l'amour est la preuve que nos molécules cytoplasmiques savent écrire des rimes. Du coup, les poètes ne me manquent plus. L'amour, c'est vrai, se substitue à la poésie. </div></blockquote>
<p>Entre ces deux extraits, respectivement l’<em>incipit </em>et l’<em>explicit </em>du roman, se tient un récit à la première personne en deux parties. La première est celle de toutes les tensions tandis que la seconde résonne comme l’échographie du narrateur face à la vindicte populaire et le procès de son crime plus que présumé.</p>
<p>Cette seconde partie est particulièrement réussie, on y suit le narrateur à l’hôpital, en prison puis à son procès, il devient alors difficile de lâcher ce roman agréablement ciselé. Les descriptions acoustiques et les réflexions du narrateur se remémorant les événements passés - les remontrances de sa femme et de sa fille, l’affadissement de la vie à deux, ses crises audiogènes déclenchées par son voisin du dessus jusqu’à son déferlement de violence - ne sont jamais anodines. </p>
<p>Ce roman noir de <strong>Patrícia Melo </strong>dépasse donc largement la fiction d’un fait divers tapageur pour se muer en un exercice de pensée sceptique avec une originalité de point de vue et même d’écoute. </p>
<br />
<p><em>Merci Renaud</em></p>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Gog-Magog-Patr%C3%ADcia-Melo-2021#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1176Limite, de Mario Peixoto (1931)urn:md5:ce550519fc11d97a5c8d6812d0da94a32023-05-23T17:59:00+02:002023-05-23T17:59:00+02:00RenaudCinémaBrésilExpérimentalOcéanPoésieSolitude <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/limite/.limite_m.jpg" alt="limite.jpg, avr. 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Un homme et deux femmes sur un bateau</strong></ins></span></div>
<p>Cette pépite méconnue du cinéma brésilien du début du XXe siècle (et de la fin du cinéma muet) et unique réalisation à 21 ans du cinéaste <strong>Mario Peixoto </strong>fera sans doute la joie d'une poignée d'amateurs, pas plus. Je n'ai moi-même pas totalement adhéré à l'exercice de style qui développe une toile narrative expérimentale extrêmement ténue et fragmentée, comme captée au travers d'un prisme déformant les perspectives, et faisant preuve d'une liberté artistique assez sauvage. Mais ne serait-ce que pour cette tentative d'expérimentation, j'ai une très grande sympathie pour le film et pour ce qui est véhiculé, pour des extraits picorés çà et là davantage que pour l'œuvre dans son ensemble qui reste un peu trop obscure et chaotique (expérimentale quoi, pour le redire encore une fois) à mon goût.</p>
<p>La théorie est très simple : deux femmes et un homme semblent piégés sur une barque au milieu de l'océan, et plusieurs flashbacks révèlent des images très parcellaires de leurs passés respectifs. On comprend très vaguement qu'une femme s'est échappée de prison, que l'autre s'est enfuie pour quitter son mari, et que l'homme a subi des péripéties sentimentales diverses (à base de tromperie et de lèpre, rien que ça). Tout cela est raconté avec une économie de mots, c'est-à-dire de cartons, assez extrême, il doit y avoir 5 lignes de sous-titres en deux heures : autant dire que la narration se fait presque exclusivement par l'image à forte résonance symbolique et par les musiques de Satie, Debussy et Stravinsky.</p>
<p>Même s'il y a beaucoup de moments de flottement sur la durée totale, on a l'impression de naviguer dans un rêve, avec des sentiments et des sensations communiquées de manière furtive et confuse. La dimension de film issu de la fin de l'ère de muet et cette façon très poétique de raconter une histoire me fait beaucoup penser à ce que j'ai ressenti lors du second visionnage de <ins><a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/L-Atalante-de-Jean-Vigo-1934">L'Atalante</a></ins> de <strong>Vigo</strong>, sans trop parvenir à fixer ces idées. L'image du visage féminin entouré de mains menottées est très forte, elle ouvre et ferme le film pour circonscrire le cadre de ce moment à la dérive, avec pas mal de passages un poil ennuyeux, avec des répétitions pas toujours probantes à mes yeux, mais qui laissent une empreinte graphique et sensitive toute particulière.</p>
<div id="centrage">
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/limite/.img1_m.jpg" alt="img1.jpg, avr. 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/limite/.img2_m.jpg" alt="img2.jpg, avr. 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/limite/.img3_m.jpg" alt="img3.jpg, avr. 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/limite/.img4_m.jpg" alt="img4.jpg, avr. 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/limite/.img5_m.jpg" alt="img5.jpg, avr. 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/limite/.img6_m.jpg" alt="img6.jpg, avr. 2023" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Limite-de-Mario-Peixoto-1931#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1153L'Affaire Cicéron, de Joseph L. Mankiewicz (1952)urn:md5:b9f8cc5e6b90dc540385b15db254886d2023-02-27T09:57:00+01:002023-02-27T09:59:02+01:00RenaudCinémaArrivismeBrésilDanielle DarrieuxEspionnageGuerreJames MasonJoseph L. MankiewiczMéprisPhotographieRio de JaneiroSeconde Guerre mondialeThrillerTurquieVanité <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/affaire_ciceron/.affaire_ciceron_m.jpg" alt="affaire_ciceron.jpg, janv. 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"Maybe that's why I like my work. Counter espionage is the highest form of gossip."<br /></strong></ins></span>
</div>
<p>On reconnaît très vite le style de <strong>Mankiewicz</strong>, plus que dans la mise en scène de <ins>L'Affaire Cicéron</ins> à proprement parler, au caractère raffiné du scénario et des dialogues (souvent composés par lui-même ou a minima auxquels il a participé) très écrits qui constituent des joutes oratoires à chaque échange, ou presque, entre deux personnages. Impossible de cuisiner ou de repasser du linge en même temps au risque de rater 10 secondes cruciales pour la compréhension de l'ensemble. Cette forme d'élégance n'est néanmoins pas satisfaisante en soi en toutes circonstances, et il m'est déjà arrivé de me retrouver quelque peu étranger aux déluges de "virtuosité", comme par exemple devant <ins>La Comtesse aux pieds nus</ins>. Sans engagement, sans accroche, sans immersion, si le fond ne paraît par entraîné par la forme, la complexité peut se noyer toute seule dans la plus belle eau.</p>
<p>Bonne nouvelle donc puisque <ins>L'Affaire Cicéron</ins> aka "5 Fingers" n'appartient pas à cette dernière catégorie à mes yeux. Il y a deux composantes principales à l'œuvre dans cette histoire d'espionnage : la partie presque thriller, au travers des agissements du personnage de <strong>James Mason </strong>au service d'un ambassadeur anglais à Ankara et livrant des photographies de documents secrets alliés aux nazis pendant la Seconde Guerre mondiale, et la partie plus sociologique, sur ce qu'elle révèle des rapports humains, de la vision très acerbe des intérêts particuliers ou de l'opportunisme écrasant qui semble régir les relations avec un personnage comme celui de <strong>Danielle Darrieux</strong>.</p>
<p>Je passerai rapidement sur une partie de la tension devenue désuète aujourd'hui, derrière une recherche évidente de réalisme qui s'est perdue avec le temps (l'introduction surtout, très datée). Il y a tout de même quelques passages efficaces de ce point de vue-là, comme notamment la séquence digne d'<strong>Hitchcock </strong>durant laquelle une femme de ménage fait capoter le plan de l'espion — il y a là un talent net dans la mise en scène du temps qui s'écoule, lentement, terriblement lentement même, la tension allant crescendo, avec une action parallèle en hors champ qui relève presque du split screen implicite : à ce moment-là, sans même s'en rendre compte, en espérant qu'il ne se fasse pas prendre, on est presque du côté de l'Axe.</p>
<p>En revanche, la chorégraphie du jeu de dupes entre les deux personnages principaux conserve toute sa saveur, et la double explosion de vanité qui se dégagera de la conclusion est intacte. Que ce soit l'un pour son arrivisme social ou l'autre pour son arrivisme financier, les deux personnages principaux forment un duo assez intéressant dans ce qu'il renferme de rapports de domination sous-jacents. Leurs destinées sont entremêlées, et bien plus fragiles que ce qu'on pourrait penser, tandis que leurs intérêts communs seulement en apparence finissent par éclater dans tous leurs antagonismes — sans le poids d'un jugement moral, c'est à noter. La révélation finale sur la duplicité conjointe des personnages, de simples pantins au final, avec le rire de <strong>Mason </strong>à Rio à la fois très théâtral et très communicatif, forme une conclusion ironique sur le mépris profond qui couvait derrière une relation courtoise uniquement en superficie.</p>
<div id="centrage">
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/affaire_ciceron/.img1_m.png" alt="img1.png, janv. 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/affaire_ciceron/.img2_m.png" alt="img2.png, janv. 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/affaire_ciceron/.img3_m.png" alt="img3.png, janv. 2023" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/L-Affaire-Ciceron-de-Joseph-L.-Mankiewicz-1952#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1120Maine Océan, de Jacques Rozier (1986)urn:md5:fe5644c0da54d2bedd1aacf10ddaf0e32021-09-22T12:56:00+02:002022-01-30T13:12:57+01:00RenaudCinémaBernard MénezBrésilChansonComédieIleJacques RozierLoufoqueLuis RegoRevisionnageTrainVoyage <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/maine_ocean/.maine_ocean_m.jpg" alt="maine_ocean.jpg, juin 2020" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>
L'euphorie éthylique de la samba vendéenne
</strong></ins></span></div>
<p><em>Première publication le 20/06/2020.</em></p>
<p><ins>Maine Océan</ins>, c'est l'histoire de <strong>Bernard Ménez </strong>et <strong>Luis Rego</strong>, deux contrôleurs de la SNCF qui finiront par se retrouver sur l'île d'Yeu après avoir rencontré une belle danseuse brésilienne n'ayant pas composté son ticket (elle n'a pas fait "chtong à la gare" comme dit <strong>Régo</strong>) défendue par une avocate interprète maladroite. Là-bas ils se mêleront à un groupe de marins bourrus, avec <strong>Yves Afonso </strong>en tête des festivités (inoubliable Marcel Petitgars avec son dialecte aussi attachant qu'à la limite de l'incompréhensible), ensorcelés par un improbable imprésario américain qui fera miroiter une carrière de "nouveau Maurice Chevalier" à <strong>Bernard Ménez</strong>, totalement envoûté et désinhibé par l'alcool (inoubliable "je suis le roi de la samba"). Un bordel monstre, en résumé, articulé par les incompréhensions infinies des différentes langues (français, brésilien, anglais, patois de marin-pêcheur) et des différents quiproquos, qui rejoint en ce sens la cacophonie importée par <strong>Pierre Richard </strong>et <strong>Jacques Villeret </strong>dans <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Les-Naufrages-de-l-ile-de-la-Tortue-de-Jacques-Rozier-1976"><ins>Les Naufragés de l'île de la Tortue</ins></a>. Un peu comme du surréalisme prosaïque à la Dumont, en version ilienne et vendéenne.</p>
<p><strong>Bernard Ménez </strong>abandonnant son costume de contrôleur aigri dans la grisaille ferroviaire pour lentement se transformer en un fanfaron chanteur sous l'effet des vapeurs d'alcool, de l'air frais du large et des promesses fourbes d'un producteur fantasque, c'est un grand moment. On pourrait reprocher à <strong>Jacques Rozier </strong>une certaine longueur, pour peu qu'on n'adhère pas au délire hypnotisant de cette bande de gais-lurons qui déambulent de trains en bistrots et de pianos en bateaux. L'émancipation du contrôleur qui a vu ses rêves et ses désirs trop longtemps refoulés se fait en roue libre et son emballement peut ne pas faire rire, au même titre que les baragouinages incessants de Petitgars. Mais ce serait passer à côté d'un sens de l'aventure tellement particulier... La façon dont cette troupe hétéroclite s'envole de son quotidien et prend le large de manière impromptue est à mes yeux irrésistible.</p>
<p>La surprise du chaos narratif, partagé entre une forme de réalisme exacerbé et une certaine tendance à s'éterniser dans le plan, se poursuivra jusque dans le dernier temps du film, lorsque la réalité se rappellera au contrôleur, perdu au milieu de l'océan et contraint de sauter de bateau en bateau pour retrouver la rive et sa vie de train. Une échappée buissonnière totalement foutraque et insolite, clivante aussi, dont le caractère fantaisiste pourra être très rebutant, le propre des comédies loufoques. Mais cette façon de filmer une envolée existentielle, le temps d'une courte escapade, façonnée dans un pragmatisme quotidien paradoxal, se terminant en cuissardes, valise à la main, échoué sur un banc de sable après l'annulation d'un vol pour New York, est d'une tendresse incroyablement attachante. Le bazar absolu d'une soirée samba surréaliste dans une salle municipale, ce moment de liberté, au-delà des obstacles à la communication et avant le retour à la réalité, aura changé bien des choses.</p>
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/maine_ocean/.afonso_menez_m.png" alt="afonso_menez.png, juin 2020" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<p><em>Première publication le 22/09/2021.</em></p>
<p>J'avais totalement oublié à quel point "Maine Océan" baigne dans ses propres flottements, avec des séquences qui s'étirent bien au-delà du raisonnable, des changements de tons incompréhensibles, et toutes ces approximations qui indiquent bien comment le film a été construit sur de l'improvisation et des aléas de tournage. De fait, l'intrigue n'existait qu'à l'état de squelette, et l'ensemble a dérivé au gré de l'inspiration. Dix années séparent ce film du précédent de Rozier, "Les Naufragés de l’île de la Tortue", qui n'a réalisé que quelques films entre 1960 et 2000.</p>
<p>On serait bien en peine d'identifier un protagoniste au sens strict, même si en lisant le film à l'envers on est tenté de voir Bernard Ménez comme le réceptacle du propos, à savoir le refoulement des rêves et des désirs, réveillés par la folie d'un weekend alcoolisé qui emporte tout sur son passage, comme une tornade, avant de retourner de manière brutale au pragmatisme quotidien et laborieux. Il faut apprécier les longueurs des scènes qui l'opposent, notamment, à Yves Afonso (Marcel Petitgas) en roue libre totale — il prend beaucoup d'espace et n'en laisse pas beaucoup à son avocate maladroite pas plus qu'à la danseuse brésilienne qui n'existe que le temps d'une danse hypnotisante.</p>
<p>Avec le recul, le délire loufoque m'a moins envoûté, mais l'inadaptabilité de ces fous à la norme est devenue plus palpable, avec pour point culminant l'errance finale du personnage sur une côte déserte. Les tensions premières disparaissent peu à peu, en échangeant, pour laisser place à des amitiés certes passagères. On garde les souvenirs d'une samba endiablée au cœur d'une échappée buissonnière, avec des alliages aussi exotiques qu'insolites qui sont bien difficiles à retranscrire à l'écrit. Un fond de philosophie de joie de vivre peut-être, ou du moins de l'euphorie passagère qui transperce les difficultés de communication et l'hétérogénéité des milieux.</p>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Maine-Ocean-de-Jacques-Rozier-1986#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/795De l'or en barres, de Charles Crichton (1951)urn:md5:37b26e020825047664422a77a54c66402021-04-23T09:50:00+02:002021-05-03T13:29:32+02:00RenaudCinémaAlec GuinnessAudrey HepburnBrésilBurlesqueComédieParisRoyaume-Uni <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/or_en_barre/.or_en_barre_m.jpg" alt="or_en_barre.jpg, avr. 2021" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"I propagate British cultural depravity."<br /></strong></ins></span></div>
<p><ins>The Lavender Hill Mob</ins> est un joli représentant de l'heure de gloire de la comédie britannique des années 40 et 50, dont les Ealing Studios constituent un peu la figure de proue avec des films comme <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Noblesse-oblige-de-Robert-Hamer-1949"><ins>Noblesse oblige</ins></a>, <ins>Tueurs de dames</ins>, <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Passeport-pour-Pimlico-de-Henry-Cornelius-1949"><ins>Passeport pour Pimlico</ins></a>, ou encore <ins>L'Homme au complet blanc</ins>. Un film entièrement raconté en flashback depuis Rio de Janeiro où le protagoniste incarné par <strong>Alec Guinness </strong>coule des jours heureux après avoir fait fortune d'une manière bien singulière — l'objet du flashback. Dans ces premières minutes, il ne faut pas trop cligner des yeux pour apercevoir <strong>Audrey Hepburn </strong>dans l'un de ses premiers rôles, avec 5 secondes de présence et une petite phrase seulement.</p>
<p>L'histoire d'un convoyeur de fonds qui rêve de s'emparer des lingots d'or qu'il surveille régulièrement, et dont la rencontre avec un artisan fabricant de tours Eiffel en plomb, alliée à une promotion inattendue, précipitera les plans. L'idée est simple en théorie : l'or volé substituera le plomb et sera utilisé pour fabriquer des babioles dorées, envoyées en France pour pouvoir écouler la marchandise sereinement. Une grande partie de ce film, par l'auteur de <ins>Un poisson nommé Wanda</ins> 37 ans plus tard, est dédiée à l'élaboration et la mise en œuvre du plan, avec tout le charme distingué de <strong>Sir Guinness </strong>au service de la sophistication comique, pour ensuite embrayer sur le versant beaucoup plus expansif dans le loufoque, lorsque des touristes achètent sans le savoir les précieux souvenirs, enclenchant à ce titre une course-poursuite en deux temps : d'abord, les deux larrons à la poursuite des objets, puis les mêmes en fuite traqués par la police.</p>
<p>Le duo <strong>Stanley Holloway </strong>/ <strong>Alec Guinness </strong>fonctionne vraiment bien à une époque où le buddy movie n'existait pas, dans un sens du burlesque typique, attendu, mais toujours aussi agréable. Le rythme souffre de quelques passages à vide, en abusant des poursuites, mais les nombreux "rôles" de <strong>Guinness</strong>, qui oscille entre différentes identités allant du bourgeois au petit fonctionnaire en passant par le malfrat fin calculateur, rehausse le tout. La descente délirante de la (vraie) Tour Eiffel, la fuite des deux compères (avec embrouille à l'aide de la radio), et quelques autres passages resteront au-dessus du lot, même si des films comme <ins>Whisky à gogo</ins> me paraissent supérieurs. Les parfums de whisky écossais, sans doute.</p>
<div id="centrage">
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/or_en_barre/.rencontre_m.jpg" alt="rencontre.jpg, avr. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/or_en_barre/.tours_m.jpg" alt="tours.jpg, avr. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/or_en_barre/.corde_m.jpg" alt="corde.jpg, avr. 2021" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/De-l-or-en-barre-de-Charles-Crichton-1951#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/944