Je m'attarde - Mot-clé - Ecologie le temps d'un souffle<br />2024-03-25T15:05:00+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearPhase IV, de Saul Bass (1974)urn:md5:947126b0c994e89f64a8ed6cbe5eee072023-12-13T12:11:00+01:002023-12-13T12:12:11+01:00RenaudCinémaAnimalApocalypseEcologieExpérimentationFourmiSaul BassScienceScience-fictionSérie B <a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/phase_iv.jpg" title="phase_iv.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/.phase_iv_m.jpg" alt="phase_iv.jpg, déc. 2023" class="media-center" /></a>
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"We knew then, that we were being changed... and made part of their world. We didn't know for what purpose... but we knew, we would be told."</strong></ins></span>
</div>
<p><ins>Phase IV</ins> est un film intimidant, en tant que film culte de science-fiction des années 70 étant cité de manière très large dans des horizons divers, laissant également entrevoir une sorte de déception nécessaire, que ce soit à la découverte comme beaucoup d'œuvres dites cultes ou même (voire surtout) lorsqu'il s'agit de reposer dessus des yeux endurcis par dix années de cinéphilie / cinéphagie.</p>
<p>Entre-temps, j'ai pu parcourir la filmographie de <strong>Saul Bass </strong>— dont c'est l'unique long-métrage, l'histoire est connue, étant donné le four du film à sa sortie, ce dernier n'ayant acquis le statut de film culte que plusieurs années plus tard à l'occasion d'une nouvelle phase de diffusion. Cela ne l'a pas pour autant stoppé dans le processus de réalisation, puisqu'il est l'auteur d'une petite dizaine de courts-métrages étalés entre les années 60 et 80, souvent sur des thématiques de science-fiction, parfois du côté de l'animation, et en collaboration avec sa femme <strong>Elaine Bass </strong>à l'occasion de deux courts, <ins>The Solar Film</ins> (1980) et <ins>Quest</ins> (1984). C'est aussi pour son travail de graphiste qu'il jouit d'une excellente réputation, que ce soit pour la création de génériques ou d'affiches, en collaboration avec des monstres comme <strong>Otto Preminger</strong>, <strong>Alfred Hitchcock </strong>ou encore <strong>Martin Scorsese </strong>— voir à ce titre <ins>Bass on Titles</ins>, réalisé en 1982.</p>
<p>Deux choses choquent pas mal à la revoyure : la douleur d'un scénario poussif par endroits, et l'originalité globale qui se maintient très nettement.</p>
<p>C'est du côté de la direction des quelques acteurs que <ins>Phase IV</ins> pèche le plus lourdement, que ce soit dans la conduite de l'expérience scientifique avec son côté très désuet et ampoulé ou dans l'irruption du personnage féminin assez faiblement écrit. Le film n'est pas long mais souffre énormément de ces séquences trop mal foutues qui pouvaient éventuellement mystifier la foule des années 1970, alors qu'elles apparaissent aujourd'hui dans toute leur esbroufe. J'ai beaucoup de respect pour tout l'attirail de l'instrumentation analogique, les câbles, les vieux écrans d’oscilloscope où l'on voit les électrons former les spots fluorescents, mais le plan des deux chercheurs est quand même particulièrement rudimentaire. On peut dire que les fourmis sont infiniment plus passionnantes que les humains...</p>
<p>En revanche, immense respect pour la mise en scène des fourmis, systématiquement filmées en gros plan de façon à établir une équivalence avec l'espèce humaine, avec une gradation géniale dans la menace qu’elles font peser. Il faut apprécier le délire de formaliste, mais ces fourmis qui évoluent dans des sortes de catacombes aux formes très géométriques, ça produit un effet franchement stupéfiant — qui sera en plus exacerbé par la fin alternative, lorsqu'un personnage y sera projeté, occasionnant une sorte d'aperçu glaçant de ce qui attend l'humanité. <strong>Saul Bass </strong>est parvenu à leur conférer une intelligence tangible, dans leur réaction face au poison jaune, ainsi qu'une agressivité nette, au travers des nombreuses structures construites pour malmener la vie des protagonistes. C'est en tous cas une réussite sur ce plan-là bien au-delà de ce que le faux documentaire <ins>The Hellstrom Chronicle</ins> ("Des insectes et des hommes") avait pu proposer quelques années auparavant en 1971, même si les points communs sont loin d'être négligeables.</p>
<p>La réputation de <ins>Phase IV</ins> (une phase qui ne sera d'ailleurs jamais racontée, puisqu'elle démarre à la fin du film, début d'une nouvelle étape dans le plan des fourmis plus extraterrestres que jamais) reste donc à mes yeux justifiée, au moins en partie, pour la quantité impressionnante d'images qu'elle incruste dans les rétines. Les reflets métalliques des carapaces, les sortes d'enterrements ou cérémonies organisées dans leurs catacombes, le bout de poison traîné dans la souffrance jusqu'à la reine, quelques fragments morbides évoquant la catastrophe nucléaire, et même les sons générés par leurs communications... On n'est pas loin du film sur une apocalypse, en tous cas une série B de haute tenue au sujet de la fin de la domination de l'être humain sur son environnement, bizarrerie au sein du Nouvel Hollywood qui trouve un écho vraiment étrange avec les préoccupations écologistes de notre époque.</p>
<div id="centrage">
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/img1.jpg" title="img1.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/.img1_m.jpg" alt="img1.jpg, déc. 2023" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/img2.jpg" title="img2.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/.img2_m.jpg" alt="img2.jpg, déc. 2023" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/img3.jpg" title="img3.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/.img3_m.jpg" alt="img3.jpg, déc. 2023" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/img4.jpg" title="img4.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/.img4_m.jpg" alt="img4.jpg, déc. 2023" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/img5.jpg" title="img5.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/.img5_m.jpg" alt="img5.jpg, déc. 2023" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/img6.jpg" title="img6.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/.img6_m.jpg" alt="img6.jpg, déc. 2023" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/img7.jpg" title="img7.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/.img7_m.jpg" alt="img7.jpg, déc. 2023" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/img8.jpg" title="img8.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/.img8_m.jpg" alt="img8.jpg, déc. 2023" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/img9.jpg" title="img9.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/phase_iv/.img9_m.jpg" alt="img9.jpg, déc. 2023" /></a>
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Phase-IV-de-Saul-Bass-1974#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1304Garbage Warrior, de Oliver Hodge (2007)urn:md5:4cdc504b5112a2407918176a967e93c22020-06-15T23:13:00+02:002020-06-15T22:17:06+02:00RenaudCinémaArchitectureEcologieEtats-UnisHippieIdéalismeRecyclage <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/garbage_warrior/.garbage_warrior_m.jpg" alt="garbage_warrior.jpg, juin 2020" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>
"I'm just glad I didn't fry a baby or something."
</strong></ins></span></div>
<p><ins>Garbage Warrior</ins> est le portrait d'un flibustier des temps modernes, un eco-warrior pragmatique en croisade contre l'institution américaine et contre l'architecture conventionnelle qui revendique corps et âme son droit de construire des maisons résilientes à l'aide — entre autres — de pneus, de bouteilles en verre et de canettes de bière.</p>
<p><strong>Michael Reynolds </strong>est un architecte américain partagé entre une forme d'idéalisme hippie et une obstination farouche, animé par la volonté chevillée au corps de construire des bâtiments autonomes baptisés "earthships". Leur design singulier et leur architecture écologique largement anti-conventionnelle, à base de recyclage de matériaux très divers, ainsi que son allure de troubadour alliée à la communauté expérimentale qu'il souhaite établir à Taos (Nouveau-Mexique) en fait un personnage tout à fait unique. Si l'on ajoute à cela son combat contre la législation du code de l'urbanisme qui dura plusieurs années (et qu'il perdit à plusieurs reprises, malgré l'empathie créée par l'ouragan Katrina), passées à rédiger des projets de loi pour qualifier son projet aussi farfelu en apparence qu'incroyable en pratique de "sustainable building test site", on a là un documentaire autant surréaliste que passionnant.</p>
<p>Bien sûr <strong>Oliver Hodge </strong>ne s'attarde pas sur le bien-fondé technique et les détails architecturaux de ses errements constructivistes : on ne saura jamais dans quelles mesures les dernières créations de Reynolds sont effectivement habitables, durables, et résistantes au temps. Au-delà de la beauté du geste, on ne saura pas si son incursion (avec toute son équipe de constructeurs) dans les îles Andaman au lendemain du séisme et du tsunami de 2004 dans l'océan Indien aura réellement porté ses fruits. Le récit fait de l'aide apportée aux populations locales est aussi beau qu'une publicité pour Greenpeace ou WWF, même si le geste reste le même (c'est-à-dire très beau).</p>
<p>Mais ces décades passées à expérimenter dans l'architecture, au grand dam de l'institution qui lui révoqua sa licence et qui lui valut une pléthore de procès, force le respect. Le genre de portrait de passionnés jusqu'au bout des ongles, mêlant en l'occurrence une certaine mystique bohème à de solides connaissances techniques. <strong>Reynolds </strong>insiste beaucoup sur la dimension "trial & error" de son œuvre, en nous emmenant dans nombre de ses anciennes constructions, imparfaites mais toujours viables. Il en a fallu, des fuites à travers le toit, des maisons trop exposées au soleil (au point de faire fondre le plastique à l'intérieur : "<em>I'm just glad I didn't fry a baby or something</em>" dira-t-il), et autres problèmes d'évacuation des eaux usées avant de parvenir à ses fins. Resteront son enthousiasme d'une touchante sincérité et sa détermination apparemment sans borne — le voir en costard et les cheveux attachés pour aller plaider sa cause auprès de l'institution, au sein d’une autorité de régulation labyrinthique et cauchemardesque, est d'ailleurs aussi drôle qu’insensé.</p>
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/garbage_warrior/.reynolds _m.jpg" alt="reynolds .jpg, juin 2020" style="margin: 0 auto; display: block;" />https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Garbage-Warrior-de-Oliver-Hodge-2007#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/791Greenpeace - Comment tout a commencé (How to Change the World), de Jerry Rothwell (2015)urn:md5:16277bb0928d4d6cfbdafcaf26c1a1cc2017-04-13T16:16:00+02:002017-04-13T15:29:32+02:00RenaudCinémaCanadaDocumentaireEcologieGreenpeaceMilitantismePaul WatsonTerre-Neuve <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/how_to_change_the_world/.how_to_change_the_world_m.jpg" alt="how_to_change_the_world.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="how_to_change_the_world.jpg, avr. 2017" /><div id="centrage"><p><span style="font-size: 18pt;"> <ins><strong>Bob, Paul et Patrick sont dans un bateau.<br /></strong></ins></span></p>
</div>
<p>On s'attend à un documentaire élogieux, comme on en voit tant, qui sacraliserait une institution en misant sur des aspects classiques ayant trait à l'émotionnel ou au nostalgique... alors que <ins>How to Change the World</ins> est avant tout un portrait de groupe étonnamment contrasté, doublé d'une réflexion sur l'engagement (écologique, entre autres) et ses petites complications. C'est en réalité un savoureux documentaire canadien qui prend le temps de décrire les conditions qui ont vu naître le mouvement Greenpeace, au cours de la décennie si caractéristique des 70s, avec tous ses espoirs et tous ses bouillonnements. Le point d'ancrage se situe autour de l'annonce du gouvernement américain de l'ère Nixon sur des essais nucléaires à Amchitka, en Alaska, et de la réaction d'un groupe hétéroclite de militants en tous genres (journaliste, écologiste, pacifiste, scientifique, ou tout simplement hippie commun) qui se constitua dans la protestation. C'est un retour sur le début des années 70 à la composante nostalgique forcément non-négligeable, avec l'incroyable effervescence des mouvements sociaux aussi motivés que mal organisés, mais sous un angle à la fois drôle et sérieux, émouvant mais lucide. Une lucidité étonnante, à commencer par le regard sur les approches très différentes de Bob Hunter, Paul Watson, et Patrick Moore (les trois principaux membres originels) en matière d'écologie politique et de rapport aux médias.</p>
<p><strong>Bob Hunter </strong>d'abord, le fondateur officiel, celui qui a défendu une certaine ligne pacifiste jusqu'à sa mort en 2005. C'est autour de lui que se sont initialement regroupés les autres.</p>
<p><strong>Paul Watson</strong>, ensuite, le chien fou qui se fera virer du groupe à la fin des années 70 pour ses aspirations légèrement (euphémisme) différentes et sa propension à agir de manière plus directe et plus violente ("<em>quand tu vois une femme se faire violer dans la rue, on s'en branle du témoignage, il faut aller l'aider</em>", en substance, au sujet de la position passive de son pote journaliste face à l'abattage de phoques pour leur fourrure). Il fondera par la suite la <em>Sea Shepherd Conservation Society </em>pour poursuivre selon sa philosophie, dans cette direction des luttes plus franches. Le genre à foncer tout droit contre un navire de pêche pirate, avec son propre bateau, pour lui briser la coque. Un mec légèrement bourrin sur les bords, donc, qu'on taxerait d'intégrisme s'il appartenait au camp opposé mais qu'on admire presque religieusement pour son intégrité dans le cas contraire.</p>
<p>Et puis <strong>Patrick Moore</strong>, le champion incontesté en matière de retournage de veste. Il quitta Greenpeace en 1986 suite à divers différends idéologiques avant de se consacrer à une carrière de lobbying auprès de grands groupes industriels, en sa qualité d'ex-militant Greenpeace et nouveau climato-sceptique.</p>
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/how_to_change_the_world/.peche2_m.jpg" alt="peche2.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="peche2.jpg, avr. 2017" />
<p>Le documentaire excelle dans ce registre, en montrant à quel point des trajectoires qui semblaient si proches, si parallèles, ont fini par fondamentalement diverger. Il capte très bien la fin d'une effervescence, et les débuts d'un nouvel ordre pour le militantisme écologiste et l'écologie politique. <strong>Paul Watson </strong>le dira très bien : les membres de Greenpeace ont beau être parvenus à rassembler d'immenses fonds, ils n'auront jamais été aussi efficaces et percutants que quand ils se lançaient à une poignée d'activistes cramés, à bord de deux Zodiacs, contre d'immenses bateaux de pêche illégaux ou de véritables usines-abattoirs flottants. Ils ne possédaient presque rien mais leurs motivations étaient sans limite.</p>
<p>Un long passage est consacré à l'importance de l'image, à son pouvoir que l'on découvrait dans les années 70, et le docu exploite habilement des images d'archives sur leurs premiers exploits, choquants, avec la mer rouge du sang des baleines ou la banquise rouge du sang des phoques. Ils n'avaient peur de rien, ni d'un gigantesque harpon à baleine lancé dans leur direction, passant à quelques mètres au-dessus de leurs têtes, ni d'un immense brise-glace qu'ils arrêtèrent façon Tian'anmen. Des séquences complètement incroyables. Mais de l'autre côté de la balance, loin de la complicité des débuts, les querelles intestines et les frasques des uns et des autres eurent raison de leur projet commun et conduisirent à l'éclatement du mouvement : on se situe de fait très loin de l'ode béate à un mouvement ou du militantisme niais. Les divergences de point de vue, autant que les multiples désillusions occasionnées, sont exposées au sein d'une dynamique de l'engagement avec une franchise et une lucidité aussi rares qu'inespérées.</p>
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/how_to_change_the_world/.peche_m.jpg" alt="peche.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="peche.jpg, avr. 2017" />https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Greenpeace-Comment-tout-a-commence-How-to-Change-the-World-de-Jerry-Rothwell-2015#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/403« Mais qu'est-ce que tu bétonnes, doudou, dis donc ? »urn:md5:eea6f7258ea373e8b38f7e713f4b72e92013-01-07T08:00:00+01:002013-01-07T08:00:00+01:00RenaudPresseCharlie HebdoEcologieFabrice NicolinoIleIle de La RéunionRéminiscence <p><img title="projet.jpg, janv. 2013" style="margin: 0 auto; display: block;" alt="projet.jpg" src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/PRESSE/charlie/Mais_qu_est_ce_que_tu_betonnes_doudou_dis_donc/.projet_m.jpg" /></p>
<div id="centrage"><em>Le projet d'autoroute sur la côte ouest de La Réunion.</em></div>
<p>Dans le <em>Charlie Hebdo</em> de cette semaine, un article plein de réminiscences de mon séjour sur l'<a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/La-Reunion-Rencontre-avec-une-ile">île de La Réunion</a> écrit par <strong>Fabrice Nicolino</strong>, auteur des passionnants <ins>Bidoche, l'industrie de la viande menace le monde</ins> (2009) et <ins>Qui a tué l’écologie ?</ins> (2011) <a name="nicolino_back" href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Mais-qu-est-ce-que-tu-betonnes-doudou-dis-donc#nicolino">(1)</a>, tous deux sortis chez <em>Les Liens qui Libèrent</em> (voir <a title="http://www.editionslesliensquiliberent.fr/f/index.php" href="http://www.editionslesliensquiliberent.fr/f/index.php">le site de l'éditeur</a>). On se situe au cœur des Grands Projets Inutiles Imposés (GPII) du type Notre-Dame-des-Landes, qui ont leur propre site internet (<a title="http://forum-gpii-2012-ndl.blogspot.fr/" href="http://forum-gpii-2012-ndl.blogspot.fr/">lien</a>) et qui avaient fait l'objet d'un article dans le Diplo d'août 2012 (lire <a title="http://www.monde-diplomatique.fr/2012/08/DEVALPO/48057" href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Le-Monde-diplomatique-aout-2012">le billet correspondant</a>, ou lire <a title="http://www.monde-diplomatique.fr/2012/08/DEVALPO/48057" href="http://www.monde-diplomatique.fr/2012/08/DEVALPO/48057">l'article intégral</a> sur le site du Diplo).</p>
<p>À La Réunion, comme on ne sait plus trop comment dilapider l'argent public, les politiques locaux (un certain <strong>Didier Robert</strong> en tête) et le lobby du BTP (incarné par <strong>Bernard Siriex</strong>, président de la fédération réunionnaise du BTP) semblent prêts à dépenser entre 1,6 et 3 milliards d'euros pour une route de 12 kilomètres, entre Saint-Denis et La Possession. Tous ceux qui vivent ou ont vécu à La Réunion connaissent les problèmes récurrents de circulation sur l'île, localisés aux abords des deux grandes villes (Saint-Denis au nord et Saint-Pierre au sud) et qui resteront donc <em>grosso merdo</em> inchangés suite à ce projet pharaonique. La principale cause de ces embouteillages : des transports en commun pratiquement inexistants, qui assurent seulement 6% des déplacements aujourd'hui contre 30% il y a une vingtaine d'années.<br /> <strong>Jean-Pierre Marchaud</strong> (voir <a title="http://jeanpierremarchau.eelv-legislatives.fr/" href="http://jeanpierremarchau.eelv-legislatives.fr/">son site</a>), écolo réunionnais et l'un des « criminels » dénoncés par l'homme du BTP local, se démène avec une poignée d'autres pour faire capoter ce qu'il appelle « Notre-Dame-du-littoral » et rappelle que, jusqu'en 2007, l'ancien conseil régional envisageait la construction d'une ligne de chemin de fer pour une sorte de tram-train, sur le même tracé que l'actuel projet. Le coût aurait été bien moindre, certes, mais le béton n'aurait pas coulé avec autant d'enthousiasme, pour le plus grand bonheur de Siriex & Cie...</p>
<p><img title="marchau.jpg, janv. 2013" style="margin: 0 auto; display: block;" alt="marchau.jpg" src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/PRESSE/charlie/Mais_qu_est_ce_que_tu_betonnes_doudou_dis_donc/.marchau_m.jpg" /></p>
<div id="centrage"><em><strong>Jean-Pierre Marchaud</strong>, « criminel » selon certains, mais surtout écolo.</em></div>
<p>Rappelons que La Réunion est une île de 880 000 habitants, l'un des départements français les plus pauvres et les plus endettés, et que 30% de la population est au chômage, avec un pic à 60% chez les jeunes actifs de 15 à 24 ans. Investir une somme aussi colossale pour faire passer les <em>lotos</em> (bagnole, en créole réunionnais) signifie très probablement qu'aucun autre investissement ne sera envisagé, comme ce tram-train qui aurait au passage rendu un immense service aux pauvres, dans cette île où un habitant sur trois n'a pas de voiture.</p>
<p><span style="font-size: 9pt;">
<a name="nicolino">(1)</a> Écouter à ce sujet l'émission de <strong>Mermet</strong> consacrée au bouquin de <strong>Nicolino</strong> : <a href="http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=2139" title="http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=2139">http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=2139</a>. Attention, amateurs du Grenelle de l’environnement, de WWF, de France Nature environnement, de Greenpeace ou encore de la Fondation Nicolas-Hulot : déprime assurée... <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Mais-qu-est-ce-que-tu-betonnes-doudou-dis-donc#nicolino_back">(retour)</a><br /></span></p>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Mais-qu-est-ce-que-tu-betonnes-doudou-dis-donc#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/194Yucca Mountain, de John d'Agata (2012)urn:md5:1bdd4ce5b848d1938c557b6aec91e0992012-10-13T15:40:00+01:002012-10-13T17:20:57+01:00GillesLectureDéchets radioactifsEcologieEssaiNucléaireSuicide <blockquote><p>« What happens when an essayist starts imagining things, making things up, filling in blank spaces, or — worse yet — leaving the blanks blank? »</p>
<p>John d'Agata, <ins>The Next American Essay</ins></p>
</blockquote><a title="YuccaMountain_J_Agata.jpg" href="http://www.gophoto.it/view.php?i=http://www.je-mattarde.com/public/GILLES/LIVRES/YuccaMountain_J_Agata.jpg"><img title="YuccaMountain_J_Agata.jpg, août 2012" style="margin: 0 auto; display: block;" alt="YuccaMountain_J_Agata.jpg" src="http://www.je-mattarde.com/public/GILLES/LIVRES/.YuccaMountain_J_Agata_m.jpg" /></a><p>Les réacteurs américains sont inefficaces à 97% ce qui signifie qu'entre le moment où on place une barre de combustible dans un réacteur nucléaire et celui où on le retire, il conserve 97% de sa radioactivité. Alors il a fallu imaginer un projet d'enfouissement de ces déchets radioactifs. C'était « Yucca Mountain ». À 140 km de Las Vegas. Projet prévoyant de construire 160 km de galeries à l'intérieur de la montagne et, en l'espace de quarante ans, de les remplir avec 77000 tonnes de déchets nucléaires, puis de sceller et de fermer la montagne jusqu'à leur décomposition.</p>
<p>Le livre retrace le parcours politique et scientifique du projet qui a vu ré-interpréter un problème de millions d'années dans une solution ramenée à 10.000 ans (un bel acte de foi aux générations futures), ainsi que l'histoire tragique de <strong>Lévi Presley</strong> - un garçon qui a sauté de la tour « <em>Stratosphere</em> » à Las Vegas - et la connexion de sa mort avec la propre expérience <strong>d'Agata</strong> répondant aux appels de personnes au bord du suicide sur une ligne d'écoute. Le récit avançant sur plusieurs niveaux à la fois se tient sur une ligne
tendue entre le documentaire et la fiction, un travail de journalisme
libéré de ses contraintes rigides mais qui s'attache férocement aux
faits comme en rend compte les 131 notes en fin de livre. </p>
<blockquote><p>Il est clair que si j'attire l'attention sur quelque chose qui fait sens en apparence, il est possible qu'il n'y ait là rien de vrai. Nous perdons parfois notre connaissance en cherchant l'information. Nous perdons parfois notre sagesse en cherchant la connaissance.
</p>
</blockquote>
Il fournit des rapports de médias, des avis d'experts et des reportages à la première personne. Il donne des statistiques, des calculs et des projections (ses scénarios prospectifs sont simplement fascinants), il cite des documents de politique et se plonge dans les études scientifiques et universitaires. Également mélangés parmi des références littéraires, et artistiques comme les quelques pages où il convoque <ins>Le Cri</ins> de <strong>Edvard Munch</strong> (figure qu'on retrouve en illustration de couverture sous la forme des isoclines de cette carte factice d'une montagne), il juxtapose ces éléments connexes sans jamais freiner le récit. Tout fait sens. 130 pages plus tard, on ressort du livre scotché et admiratif en songeant à la tension dramatique insufflée au récit, et à la singulière façon de cet écrivain de réexaminer non seulement où nous sommes, mais aussi où nous avons été, et où nous allons.
<p>Tout au long de cette lecture, on rit, souvent d'un rire jaune face à la méchante farce humaine qui œuvre autour du projet Yucca Mountain. A ce propos, voici ce que John D'Agata dit lors d'une lecture de son essai à des jeunes étudiants américains en 2010 :</p>
<blockquote><p>« Do not be afraid to laugh at the absurdities, though by no means feel I am pressuring you to laugh »</p>
</blockquote><p><span style=""><br /></span></p>
<p><span style=""><img title="yucca_mountain.jpg, oct. 2012" style="margin: 0 auto; display: block;" alt="yucca_mountain.jpg" src="https://www.je-mattarde.com/public/GILLES/LIVRES/.yucca_mountain_m.jpg" /><br /></span></p>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Yucca-Mountain-John-d-Agata-2012#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/145Le Retour du Gang de la Clef à Molette, de Edward Abbey (1989)urn:md5:e51ace7fc200310dc146d86c16aecb382012-09-16T08:00:00+02:002012-09-16T08:00:00+02:00RenaudLectureActivismeAnarchismeEcologieEdward AbbeyOrganisation radicaleSabotage <p><img title="retour_gang_clef_molette.jpg, sept. 2012" style="margin: 0 auto; display: block;" alt="retour_gang_clef_molette.jpg" src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/LECTURE/retour_gang_clef_molette/.retour_gang_clef_molette_m.jpg" /></p>
<p><ins>Le Retour du Gang de la Clef à Molette</ins> (<em>Hayduke lives!</em> en V.O.) est un roman écrit en 1989 par <strong>Edward Abbey</strong>, traduit de l'américain par <strong>Jacques Mailhos</strong>. Il s'agit de la suite des aventures des membres de l'écolo-gang le plus célèbre et le plus déjanté au monde, relatées quinze ans plus tôt dans <ins>Le Gang de la Clef à Molette</ins> (<a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Le-Gang-de-la-Clef-a-Molette">chroniqué ici</a>).</p>
<p>Mais qu'est-il arrivé aux héros écolos, intrépides et insolents qui sévissaient à l'ouest du Pecos (affluent du Rio Grande), aux frontières de l'Utah et du Nevada ? L'activisme d'antan et le sabotage certifié bio semblent avoir été relégués au second plan. Doc Sarvis et Bonnie Abbzug, qui se sont mariés entre les deux volumes, pouponnent tranquillement avec leur chérubin Reuben — en attendant le suivant (ou la suivante, selon Bonnie). « Seldom Seen » Smith organise des excursions en canoë pour touristes et gère ses deux ou trois ménages — il est mormon et en profite tant qu'il peut. Seuls George Hayduke et un mystérieux cavalier solitaire perpétuent la lutte ancestrale de l'homme allié de la Nature contre l'homme allié de la Machine. Car il y a du boulot : le super-excavateur géant GOLIATH, le plus terrifiant engin jamais construit par l’homme, menace les déserts de l’ouest. Lentement mais sûrement, réduisant à néant tout ce qui se présente sur son passage (forêts luxuriantes, genévriers en fleurs, tortues centenaires), il se dirige vers le site d'une future mine d'uranium, nouvel Eldorado de la région. L'évêque Mgr Love, dont la cupidité n'a pas fléchi avec les années, rêve de construire de luxueux hôtels au milieu des quelques terres vierges restantes et n'hésite pas à déguster à pleines dents du minerai radioactif en public pour persuader l'opinion commune du caractère inoffensif de l'énergie nucléaire.<br />Heureusement, le mouvement « Earth First! », dénué de chef mais représenté par la délicieuse scandinave Erika, est bien présent et proteste activement contre les méfaits de la société industrielle en manque de terrains constructibles. Amoureux des sites sublimes de l'Amérique sauvage, de ses rapides comme de ses canyons, les guerriers de l'écologie ne reculent devant rien, pas même devant les tonnes d'acier motorisées qui se font chaque jour plus menaçantes.<br />Le deuxième round peut commencer...</p>
<p><img title="edward_abbey.jpg, sept. 2012" style="margin: 0 auto; display: block;" alt="edward_abbey.jpg" src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/LECTURE/retour_gang_clef_molette/.edward_abbey_m.jpg" /></p>
<p> Les ingrédients qui ont fait la réussite et la renommée du premier opus demeurent : dialogues crus et potentiellement graveleux de personnages hauts en couleur, envolées lyriques quand il s'agit de décrire les paysages bucoliques de l'ouest américain, et final époustouflant où convergent toutes les tensions, toutes les inconnues du récit. Même si le roman d'<strong>Abbey</strong> peut par endroits manquer de renouveau par rapport à l'œuvre première, l'intensité du plaisir suscité est telle qu'on ne saurait se priver de cette friandise.</p>
<blockquote><p>« One final paragraph of advice: do not burn yourselves out. Be as I am – a reluctant enthusiast….a part-time crusader, a half-hearted fanatic. Save the other half of yourselves and your lives for pleasure and adventure. It is not enough to fight for the land; it is even more important to enjoy it. While you can. While it’s still here. So get out there and hunt and fish and mess around with your friends, ramble out yonder and explore the forests, climb the mountains, bag the peaks, run the rivers, breathe deep of that yet sweet and lucid air, sit quietly for a while and contemplate the precious stillness, the lovely, mysterious, and awesome space. Enjoy yourselves, keep your brain in your head and your head firmly attached to the body, the body active and alive, and I promise you this much; I promise you this one sweet victory over our enemies, over those desk-bound men and women with their hearts in a safe deposit box, and their eyes hypnotized by desk calculators. I promise you this; You will outlive the bastards. »<br /><br /><strong>Edward Abbey</strong></p>
</blockquote>
<img title="edward_abbey_nucleaire.jpg, sept. 2012" style="margin: 0 auto; display: block;" alt="edward_abbey_nucleaire.jpg" src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/LECTURE/retour_gang_clef_molette/.edward_abbey_nucleaire_m.jpg" /><br />
<p><em>D'autres citations et aphorismes du monsieur : <a title="http://people.tribe.net/shamanjamin/blog/647768d3-44dc-4bee-9200-bec0d317009c" hreflang="en" href="http://people.tribe.net/shamanjamin/blog/647768d3-44dc-4bee-9200-bec0d317009c">http://people.tribe.net/shamanjamin/blog/647768d3-44dc-4bee-9200-bec0d317009c</a>.</em></p>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Le-Retour-du-Gang-de-la-Clef-%C3%A0-Molette-de-Edward-Abbey-1989#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/152Soleil Vert, de Richard Fleischer (1973)urn:md5:62852bc4d1db79cba859b1d6474035e22012-03-08T12:35:00+01:002012-03-09T16:37:08+01:00RenaudCinémaAnticipationCharlton HestonDystopieEcologieEdward G. RobinsonEuthanasieRaréfaction des ressourcesRichard FleischerScience-fiction <p><img title="Soleil Vert, fév. 2012" style="margin: 0 auto; display: block;" alt="soleil_vert.jpg" src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/soleil_vert/.soleil_vert_m.jpg" /></p>
<p><ins>Soleil Vert</ins> est un film de science-fiction dystopique réalisé en 1973 par <strong>Richard Fleischer</strong>. C'est l'adaptation d'un roman de <strong>Harry Harrison</strong> paru sept ans plus tôt sous le titre <ins>Make Room! Make Room!</ins> dont le film ne reprend que l'univers, le scénario différant sensiblement de l'œuvre originale <a name="original_back" href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Soleil-Vert-de-Richard-Fleischer-1973#original">(1)</a>. L'action se déroule en 2022 (soit 23 ans plus tard que celle du livre, certainement pour mieux ancrer l'éloignement temporel), sur une Terre ruinée par l'Homme qui en a épuisé la quasi-totalité des ressources naturelles. L'immense majorité de la population vit dans la misère de l'insécurité alimentaire et ne parvient à se nourrir qu'au travers d'aliments de synthèse produits par une entreprise agroalimentaire appelée « <em>Soylent</em> ». Seuls les plus fortunés peuvent se payer le luxe de mets traditionnels de plus en plus rares, symboles d'une époque révolue. Robert Thorn, un
détective interprété par <strong>Charlton Heston</strong>, enquête sur un étrange meurtre et va découvrir, au péril de sa vie, l'effroyable et morbide réalité qui se cache derrière cette
société déshumanisée.</p>
<div id="centrage"><em>Intermède : diatribe personnelle.<br /></em></div>
<p>Le nom<img title="Le fameux « Soylent Green », mar. 2012" style="float: right; margin: 0 0 0.1em 1em;" alt="soylent_green.jpg" src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/soleil_vert/.soylent_green_s.jpg" /> de cette nourriture synthétique, « <em>Soylent Green</em> », directement lié à celui de l'entreprise et au cœur de l'intrigue, est en réalité la contraction des mots anglais « <em>soy</em> » (soja) et « <em>lentil</em> » (lentille), deux produits autrefois commercialisés par la firme. Certainement en manque d'imagination (ou tout simplement dépourvue de bon sens), la distribution française, au lieu de conserver le titre original du film en toute simplicité, n'a trouvé guère mieux que cet affligeant « soleil vert », dans la droite lignée de ces titres de films, innombrables, traduits avec les pieds. Il faudra un jour écrire un billet sur ce thème... En attendant, vous pouvez lire <a title="http://archives-lepost.huffingtonpost.fr/article/2010/03/04/1970920_pourquoi-le-mot-enfer-dans-les-titres-francais-de-films-americains.html" hreflang="fr" href="http://archives-lepost.huffingtonpost.fr/article/2010/03/04/1970920_pourquoi-le-mot-enfer-dans-les-titres-francais-de-films-americains.html">cet article du Huffington Post</a> recensant les perles du genre. Mais passons...</p>
<p><ins>Soylent Green</ins>, donc, fait<img title="Le fameux camion benne, mar. 2012" style="float: right; margin: 0 0 -0.2em 1em;" alt="truck.jpg" src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/soleil_vert/.truck_s.jpg" /> partie de ces films d'anticipation graves aux accents quasi-prophétiques ; sans crier au chef-d'œuvre, on peut le ranger (si tant est qu'on puisse, ô sacrilège !, ranger ses DVDs/Blu-rays avec ses livres) non loin d'œuvres comme <ins>1984</ins>, <ins>Metropolis</ins>, <ins>Brazil</ins>, <ins>2001, l'Odyssée de l'Espace</ins>, <ins>THX 1138</ins>, <ins>Blade Runner</ins>, <ins>Bienvenue à Gattaca</ins> (merci Rip), <ins>Orange Mécanique</ins> ou encore <ins>V for Vendetta</ins> (<a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/V-for-Vendetta%2C-de-James-McTeigue-%282006%29"><ins>lire le billet</ins></a>) dans un registre plus léger. Malgré quelques flagrantes bévues de montage (je pense notamment à la scène d'euthanasie où l'on peut voir un câble se balader de gauche à droite), le film parvient à tisser les mailles d'un univers absorbant dont on ne saurait sortir tout à fait indemne, sans quelques égratignures psychiques. On ne peut rester totalement insensible à cette violence morale et physique d'un monde où les forces de l'ordre seraient omniprésentes, au service exclusif des plus fortunés, veillant au grain et n'hésitant pas à disperser des foules affamées à l'aide de camions bennes ramassant et écrasant par dizaines ces résidus qu'on peine à qualifier d'humain. À la différence de <ins>1984</ins> ou de <ins>Brazil</ins>, la police n'est pas vraiment dans la pensée : elle est d'abord physique, solidement ancrée dans le quotidien, et omnipotente ; elle est l'expression même d'une répression radicale, au service d'un film dont la violence est froide, mécanique, et en ce sens, inégalée.</p>
<p>Côté distribution, <img title="Charlton Heston et Leigh Taylor Young, mar. 2012" style="float: right; margin: 0 0 -0.1em 1em;" alt="Charlton_Heston_Leigh_Taylor_Young.jpg" src="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/public/RENAUD/CINEMA/soleil_vert/.Charlton_Heston_Leigh_Taylor_Young_s.jpg" /><strong>Charlton Heston</strong> (<ins>La Planète des Singes</ins>, <ins>Ben-Hur</ins>, <ins>Les Dix Commandements</ins>), mort en 2008, était décidément plus attractif au cinéma (en tant qu'acteur charismatique) qu'en politique (en tant qu'ancien président de la NRA, <em>National Rifle Association</em>). Loin de prendre la défense de la cause féminine, il profite ici d'un système où les femmes sont considérées comme du mobilier ; c'est d'ailleurs la dénomination expresse de certaines d'entre elles, comme Shirl, alias <strong>Leigh Taylor-Young</strong>, qui sont littéralement louées par la classe supérieure... Mais sa présence n'en demeure pas moins lumineuse et essentielle, tout comme celle de Sol Roth, un vieillard nostalgique de l'ancien temps dont il semble être l'unique vestige, lui et quelques autres rats de bibliothèques adeptes de vieux manuscrits poussiéreux. Il est incarné par <strong>Edward G. Robinson</strong> (<ins>Assurance sur la mort</ins>, <ins>Les Dix Commandements</ins>, <ins>Les Cheyennes</ins>), totalement sourd pendant le tournage et dont <ins>Soylent Green</ins> fut le dernier film <a name="Robinson_back" href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Soleil-Vert-de-Richard-Fleischer-1973#Robinson">(2)</a>. Ajoutez à cela la composition musicale subtile de <strong>Fred Myrow</strong>, jonglant entre les deux <em>Sixième Symphonie</em> de <strong>Beethoven</strong> et de <strong>Tchaïkovski</strong> (compositeur repris dans <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/index.php?post/V-for-Vendetta%2C-de-James-McTeigue-%282006%29"><ins>V for Vendetta</ins></a>), secouez le tout et vous obtiendrez un film prenant, modeste, mais sacrément efficace.</p>
<span style="font-size: 9pt;">
<a name="original">(1)</a> Et tant mieux, étant donné le flop du roman lors de sa sortie (aujourd'hui encore) et les dires d'un certain Monsieur Gilles. Pour une fois qu'une adaptation cinématographique transcende l'œuvre originale, on ne va pas s'en plaindre ! <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Soleil-Vert-de-Richard-Fleischer-1973#original_back">(retour)</a><br />
<a name="Robinson">(2)</a> Cruelle ironie, triste parallèle : alors qu'<strong>Edward G. Robinson</strong> interprète cette terrible scène d'euthanasie dans ce qui semble être un avant-goût d'une salle IMAX, il est déjà gravement malade. Il mourra peu de temps après la fin du tournage. Plus tard, <strong>Charlton Heston</strong> déclarera avoir réellement pleuré dans la scène où Thorn découvre qu'il ne peut plus arrêter le suicide de son ami (source : <a title="http://fr.wikipedia.org/wiki/Soleil_vert_%28film%29" hreflang="fr" href="http://www.imdb.com/title/tt0070723">IMDB</a>). <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Soleil-Vert-de-Richard-Fleischer-1973#Robinson_back">(retour)</a></span>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Soleil-Vert-de-Richard-Fleischer-1973#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/100