Je m'attarde - Mot-clé - Réalisme le temps d'un souffle<br />2024-03-25T15:05:00+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearSécheresse, de Nelson Pereira Dos Santos (1963)urn:md5:0ad02246e1fa2dd4551df3e6d4906a6a2020-11-09T11:39:00+01:002020-11-09T11:39:00+01:00RenaudCinémaBrésilDésertExploitationJohn SteinbeckMisèrePauvretéPaysanRéalismeSécheresse <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/secheresse/.secheresse_m.jpg" alt="secheresse.jpg, oct. 2020" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Sisyphe du désert<br /></strong></ins></span></div>
<p><ins>Sécheresse</ins> ou "Vidas Secas" en version originale est un conte situé au tout début des années 40, centré sur une famille de paysans pauvres dont l'histoire atteint le niveau de sécheresse du Sertão, une région du Nordeste brésilien dont le climat aride et la désolation pourraient rappeler, sous certains aspects, l'Outback d'Australie. Capturée dans un noir et blanc rugueux, empreinte d'un réalisme critique et d'une cruauté froide, l'errance de ce petit noyau familial constitué du père, de la mère, de leurs deux enfants et du chien Baleia s'apparente à un périple à travers des terres désertiques et farouchement inhospitalières. Leur trajectoire, des zones rurales les plus reculées vers les centres urbains que l'on peut deviner dans le dernier itinéraire contraint de l'épilogue, se place sous le signe de la persécution : le climat hostile, avec son intense sécheresse, l'absence d'entraide entre pauvres gens, qu'ils soient paysans ou policiers, la tyrannie des propriétaires, qui profitent de l'illettrisme de leurs ouvriers, et tous les malheurs qui jalonnent un tel exode dénué d'espoir mais comportant malgré tout quelques rares ouvertures.</p>
<p>Dans son portrait de la pauvreté paysanne, <strong>Nelson Pereira Dos Santos </strong>pourrait bien établir une passerelle avec l'autre moitié du continent américain, à travers les nombreux échos que l'on retrouve avec <ins>Les Raisins de la colère</ins> de <strong>John Steinbeck</strong>. À la fuite de la misère et de la famine s'ajoute ici celle de la sécheresse, que l'on saisit directement dans la marche éprouvante imposée à la famille en introduction. L'aridité et la poussière ne quitteront jamais l'écran, elles emplissent le regard pour former un réquisitoire corrosif sur un registre particulier, celui de la condition paysanne au Brésil. Le rythme sera uniforme du début à la fin, extrêmement lent, épousant la dimension éreintante et laborieuse de leurs pérégrinations.</p>
<p>Il n'y a pas vraiment d'éclaircies durables dans cette figure de proue du Cinema Novo — un mouvement cinématographique fondateur du cinéma brésilien des années 50 et 60, dont les influences se structurent à l'origine autour du néoréalisme italien et de la nouvelle vague française. Difficile de dire ce qui empêche une telle proposition cafardeuse de sombrer dans un misérabilisme frontal, si ce n'est l'innocence de l'enfance et son incompréhension presque comique, tenant de l'humour noir, lorsqu'un des fils ne saisit pas bien la différence entre la définition de l'enfer donnée par sa mère et la réalité qui l'entoure. Le réalisme adopté par la mise en scène n'explore toutefois pas des régions attenantes au documentaire, il s'engage plutôt dans une veine allégorique, avec une vision politique assez claire chez <strong>Nelson Pereira Dos Santos</strong>. Un montage parallèle entre le passage en prison du père (une histoire d'argent perdu au jeu et d'abus de pouvoir) et une fête folklorique dans les rues voisines confère en outre une dimension presque fantastique au film, avec une imagerie très étrange. La famille se retrouvera in fine enfermée dans le caractère cyclique de leur migration, le plan final qui les voit disparaître à l'horizon rappelant le plan initial, monté en sens inverse, laissant supposer de nouveaux sacrifices à venir.</p>
<div id="centrage">
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/secheresse/.pere_m.jpg" alt="pere.jpg, oct. 2020" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/secheresse/.mere_m.jpg" alt="mere.jpg, oct. 2020" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/secheresse/.desert_m.jpg" alt="desert.jpg, oct. 2020" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Secheresse-de-Nelson-Pereira-Dos-Santos-1963#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/857Killer of Sheep, de Charles Burnett (1979)urn:md5:73cfd37fbb5bbbe39d60b418a24625642020-09-18T14:00:00+02:002020-09-18T13:34:18+02:00RenaudCinémaAbattoirCharles BurnettEtats-UnisLos AngelesMoutonRéalismeSégrégation <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/killer_of_sheep/.killer_of_sheep_m.jpg" alt="KILLER OF SHEEP (1977), sept. 2020" style="margin: 0 auto; display: block;" title="Original 2007 theatrical poster for Charles Burnett's KILLER OF SHEEP. Courtesy of Milestone Films." />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>" I thought her old man was shootin' blanks - but I see he's droppin' bombs on occasion!"<br /></strong></ins></span></div>
<p>Très intéressante proposition de cinéma faite par <strong>Charles Burnett</strong> (auteur du très bizarre <ins>To Sleep with Anger</ins> avec <strong>Danny Glover</strong> aka sergent Murtaugh, en 1990) qui s'intéresse de manière ouvertement pseudo-documentaire à la vie dans un quartier noir pauvre de Los Angeles. Pour suivre le quotidien de Stan, un ouvrier travaillant dans un abattoir de moutons, il adopte une tonalité proche du réalisme social, dans un style qui a souvent été comparé au néoréalisme italien. Autrement dit, le fil rouge narratif se cantonnera à quelque chose de particulièrement ténu, les 80 minutes de <ins>Killer of Sheep</ins> étant essentiellement constituées de vignettes s'apparentant à de la non-fiction et très vaguement reliées entre elles. Un parti pris qui peut dérouter, de par l'impression de flottement qui perdurera du début à la fin, pour accompagner Stan dans toute sa mélancolie de travailleur pauvre.</p>
<p>Le titre du film pourrait bien sûr être relié à l'emploi du protagoniste, dont des fragments de la routine professionnelle nous parviennent régulièrement, insérés au milieu de scènes de la vie quotidienne. Il est père de famille, il n'arrive plus trop à communiquer avec sa femme (ce qui donnera une très belle scène de danse à deux, romantique et calme, au bord d'une fenêtre, laissant présager une envergure similaire à l'exceptionnel <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Un-homme-comme-tant-d-autres-de-Michael-Roemer-1964"><ins>Un homme comme tant d'autres</ins></a> qui ne se révèlera malheureusement jamais), et malgré la pauvreté dans laquelle il évolue il résiste à l'appel de l'argent facile des petits larcins. Le style global de ce cinéma vraiment indépendant pourrait se rapporter au <strong>Cassavetes </strong>de <ins>Shadows</ins> et <ins>Faces</ins>, c'est-à-dire une forme de naturalisme un brin nonchalante, toujours dans l'expectative, la langueur, voire l'abandon. Un budget limité, des acteurs non-professionnels, tournage le weekend, un extrait musical dont il mettra 30 ans à obtenir les droits : l'adéquation entre les moyens mis en œuvre et le sujet force le respect, même si cela se fait au prix d'une monotonie parfois éprouvante.</p>
<p>Reste que <strong>Burnett </strong>observe Stan avec une certaine lucidité, de galères en bricoles avec quelques moments fugaces de bonheur, comme une lente dérive autodestructrice sans prise sur le cours de sa vie. Un regard sur la classe ouvrière noire assez rare, très différent (et en ce sens très complémentaire) de films comme <ins>Blue Collar</ins>, partagé entre la compassion et le réalisme rugueux. Comme un chaînon manquant du cinéma noir américain, loin du sérieux d'un <strong>Sidney Poitier </strong>et de la bisserie / blaxploitation d'un <strong>D'Urville Martin</strong> ou d'un <strong>Fred Williamson</strong>. En filmant de manière régulière Stan au milieu de son abattoir, dans son ennui flou et son indécision latente, comme prisonnier d'une frustration urbaine, <strong>Burnett </strong>pourrait bien avoir conféré à son titre un sens beaucoup moins littéral.</p>
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/killer_of_sheep/danse.jpg" alt="KILLER OF SHEEP (1977), sept. 2020" style="margin: 0 auto; display: block;" title="Stan (Henry Sanders) and his wife (Kaycee Moore) in the film KILLER OF SHEEP, a Milestone Film & Video release." />https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Killer-of-Sheep-de-Charles-Burnett-1979#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/826L'Hirondelle et la Mésange, de André Antoine (1920)urn:md5:0f61f11988ce7b48a38c9d77ae87ff622020-06-13T12:16:00+02:002020-06-13T12:16:00+02:00RenaudCinémaBateauBelgiqueCinéma muetJean EpsteinJean VigoPoésieRéalisme <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/hirondelle_et_la_mesange/.hirondelle_et_la_mesange_m.jpg" alt="hirondelle_et_la_mesange.jpg, juin 2020" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Rivière sans retour</strong></ins></span>
</div>
<p><ins>L'Hirondelle et la Mésange</ins> vient rejoindre le cortège formé par <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/La-Belle-Nivernaise-de-Jean-Epstein-1924"><ins>La Belle Nivernaise</ins> </a>(1924, <strong>Jean Epstein</strong>), <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/L-Atalante-de-Jean-Vigo-1934"><ins>L'Atalante</ins></a> (1934, <strong>Jean Vigo</strong>) et <ins>Sous les ponts</ins> (1946, <strong>Helmut Käutner</strong>) dans le registre des romances fluviales caractérisées par une grande tendresse et marquées par une poésie s'exprimant à chaque fois dans des cadres stylistiques, temporels et géographiques bien distincts. L'histoire, très originale ici, d'un batelier naviguant sur les canaux reliant Anvers au Nord de la France à bord d'un assemblage de deux péniches (les deux oiseaux du titre) dont il est le propriétaire avec sa femme et sa belle-sœur. Petite spécificité familiale : pour arrondir les fins de mois, le bateau sert de support pour convoyer des diamants en provenance de divers trafics, soigneusement dissimulés au niveau du gouvernail durant leur acheminement à travers la frontière franco-belge.</p>
<p>Mais cette histoire n'a pas pu émerger à l'époque de sa réalisation (et n'a failli jamais émerger), en raison d'un distributeur frileux quelque peu effrayé par un contenu qu'il considérait comme démesurément documentaire, par opposition au mélodrame fictionnel, à une époque où le genre n'était pas du tout constitué et où ces aspects liés au témoignage n'étaient pas universellement intelligibles. Il faudra attendre plus de 60 ans pour que les négatifs soient redécouverts et enfin dûment exploités.</p>
<p><strong>André Antoine </strong>(encore un qui devait toujours manger en premier à la cantine) s'est ainsi donné beaucoup de mal pour filmer la vie sur une péniche, avec des points de vue aussi nombreux que variés, que ce soit le long de paisibles travellings parallèles aux berges qui regardent la vie au bord des canaux ou lors des passages fréquents de ponts mobiles (se dressant ou se tournant de toutes les façons imaginables). Le pilote que le patron embauche pour l'aider dans ses tâches physiques, qui révèlera ses véritables intentions après une longue période d'acclimatation et de prise d'informations, est interprété par <strong>Pierre Alcover</strong>, un colosse à la présence assez incroyable — du moins lorsqu'il avait 27 ans... Un peu comme dans <ins>La Belle Nivernaise</ins> qui se terminait sur le mariage, flirtant avec l'amoral, de deux personnes considérées comme frère et sœur, <ins>L'Hirondelle et la Mésange</ins> adopte une trajectoire étonnante puisque le pilote qui était destiné à la belle-sœur finira obnubilé par la femme de son patron : une longue séquence effleurant l'érotisme (voire franchement érotique pour l'époque) qui voit la femme s'enrouler le buste d'une broderie agira à ce titre comme un ensorcellement. Le début d'un ultime segment, orientée vers la tragédie et le silence des eaux.</p>
<p>À travers le réalisme des situations (à l'origine de sa quarantaine qui dura 60 ans), la poésie diffuse, le tournage en extérieur qui refuse nettement le studio (par opposition à un <strong>Louis Delluc </strong>par exemple), le détour par l'Ommegang belge (un cortège folklorique qui n'avait lieu à Anvers que tous les 25 ans) ou encore l'interprétation des acteurs qui brillent par leur sobriété à une époque qui favorisait exactement l'inverse, <ins>L'Hirondelle et la Mésange</ins> développe une étonnante forme de modernité. Déroutante hier, appréciable aujourd'hui.</p>
<div id="centrage">
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/hirondelle_et_la_mesange/.1_m.png" alt="1.png, juin 2020" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/hirondelle_et_la_mesange/.2_m.png" alt="2.png, juin 2020" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/hirondelle_et_la_mesange/.3_m.png" alt="3.png, juin 2020" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/hirondelle_et_la_mesange/.4_m.png" alt="4.png, juin 2020" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/hirondelle_et_la_mesange/.5_m.png" alt="5.png, juin 2020" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/hirondelle_et_la_mesange/.6_m.png" alt="6.png, juin 2020" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/hirondelle_et_la_mesange/.7_m.png" alt="7.png, juin 2020" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/hirondelle_et_la_mesange/.8_m.png" alt="8.png, juin 2020" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/L-Hirondelle-et-la-Mesange-de-Andre-Antoine-1920#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/789Les Réprouvés, de Luis Buñuel (1950)urn:md5:ab15bb9c974f1468777b47962fbbb4b82017-03-25T16:44:00+01:002017-03-25T16:51:06+01:00RenaudCinémaEnfanceLuis BuñuelMexiqueOnirismePauvretéRéalismeViolence <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/reprouves/.reprouves_m.jpg" alt="reprouves.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="reprouves.jpg, mar. 2017" /><div id="centrage"><p><span style="font-size: 18pt;"> <ins><strong>"Implacable comme la marche silencieuse de la lave." Octavio Paz <br /></strong></ins></span></p>
</div>
<p><ins>Los Olvidados</ins> ("Les Réprouvés", passe encore, mais alors "Pitié pour eux", quelle horreur... Pitié pour nous, oui !) rappelle dans une certaine mesure la misère et l'extrême dureté du microcosme que <strong>Buñuel </strong>dépeignait presque 20 ans auparavant dans <ins>Terre sans pain</ins>, à la limite entre documentaire et fiction. Aux espaces extérieurs espagnols de Las Hurdes succèdent les quartiers pauvres d'une ville mexicaine, mais une chose reste identique : la brutalité du regard.</p>
<p>Même si le film est clairement ancré dans la fiction, difficile de ne pas retrouver une forme de réalisme, à défaut d'être documentaire, dans la description qui est faite de ces bas-fonds. Il ne s'agit pas forcément d'une forme de réalisme social, mais plutôt de quelque chose beaucoup plus dur, âpre, et sans concession. Cruel, même, pourrait-on dire, tant la situation déplorable de la jeunesse filmée par <strong>Buñuel </strong>semble sans issue. En dépit d'une volonté évidente de s'en sortir chez certains enfants, leur condition sociale les emprisonne dans cet univers comme une toile d'araignée le ferait avec sa proie. C'est assez déprimant, il faut l'avouer.</p>
<p><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/reprouves/.mere_m.jpg" alt="mere.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="mere.jpg, mar. 2017" /></p>
<p>Il n'y a aucune âme vraiment pure dans ces quartiers oubliés : les enfants se battent quand ils ne détroussent pas des culs-de-jatte, les parents les abandonnent bien souvent à leur sort de gamins de rue, et même les aveugles professent des discours malthusianistes écœurants. Pedro aura beau tout faire pour essayer de s'en sortir, son environnement le rappellera inlassablement à sa condition de pauvre miséreux. La spirale de la violence est inéluctable mais admirablement dénuée de misérabilisme. Seule une séquence onirique portant la marque évidente du style <strong>Buñuel </strong>lui laisse un court moment de répit, avec une mère aimante et assurant son alimentation (un gros morceau de viande à la main), même si le cauchemar guette sous le lit où Jaibo l'attend.</p>
<p>Dans <ins>Les Réprouvés</ins>, les enfants tètent à même les pis de chèvre et les parents abandonnent leur progéniture. Monde cruel qui semble évoluer en vase clos, alors que la société des riches ne fera qu'une seule apparition, assez peu glorieuse, dans le film. C'est un cycle infini de misère et de désespoir qui s'auto-alimentent. Mais il n'y a pas de gentil, pas plus qu'il n'y a de véritable méchant : le seul horizon est l'absence de solution. Et la seule touche positive émane de la direction d'une prison. Comme le disait <strong>Octavio Paz</strong>, "<em>un film implacable comme la marche silencieuse de la lave</em>".</p>
<p><em><ins>N.B.</ins></em> : À noter, l'existence d'une fin alternative "heureuse" affreusement nulle.</p>
<p><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/reprouves/.coix_m.jpg" alt="coix.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="coix.jpg, mar. 2017" /></p>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Les-Reprouves-de-Luis-Bunuel-1950#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/398Réveil dans la terreur, de Ted Kotcheff (1971)urn:md5:d3b7b649877718282d15fae57cc8e8612014-03-22T23:13:00+01:002014-11-25T11:07:55+01:00RenaudCinémaAlcoolAustralieKangourouRuralitéRéalismeViolence <div id="centrage"> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/reveil_dans_la_terreur/.wake_in_fright_old_m.jpg" alt="wake_in_fright_old.jpg" title="wake_in_fright_old.jpg, mar. 2014" /> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/reveil_dans_la_terreur/.wake_in_fright_new_m.jpg" alt="wake_in_fright_new.jpg" title="wake_in_fright_new.jpg, mar. 2014" /><br />
<span style="font-size: 9pt;">Affiches originale et rééditée à l'occasion de la restauration du film.</span></div>
<p><ins>Wake in Fright</ins> ou <ins>Outback</ins> (titres d'origine) est un film australo-américain réalisé par <strong>Ted Kotcheff </strong>en 1971, adapté de la nouvelle éponyme de <strong>Kenneth Cook</strong>. Onze ans avant le premier (et seul bon) volet de la quadrilogie <ins>Rambo</ins> qui lui ouvrira les portes de Hollywood, le réalisateur canadien proposait un récit aussi ahurissant que dérangeant centré sur l'outback australien. Une œuvre dont l'atmosphère poisseuse et étouffante colle à la peau longtemps encore après le visionnage.</p>
<p>Le plan-séquence initial et la scène suivante, montrant une salle de classe paralysée par la chaleur à la veille des vacances de Noël <a name="noel_back" href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Reveil-dans-la-terreur-de-Ted-Kotcheff-1971#noel">(1)</a>, donnent d'emblée le ton des deux heures à suivre. À l'instar de <ins>The Wicker Man</ins> (1973) ou encore <ins>Phase IV</ins> (1974) sortis dans la même période, le spectateur est plongé dans un univers très singulier dont il doit comprendre puis accepter les codes. Ici, les étendues immenses et désertiques du fin fond de la campagne australienne offrent un cadre de premier choix à l'intrigue et l'isolement des environs est mis en exergue au moyen d'un plan panoramique d'ouverture très réussi.</p>
<p><img title="desert.png, mar. 2014" style="margin: 0 auto; display: block;" alt="desert.png" src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/reveil_dans_la_terreur/.desert_m.png" /></p>
<div id="centrage"> <span style="font-size: 9pt;">Bienvenue à Tiboonda, son école, son chemin de fer, son désert et... son ennui.<br /></span></div>
<p><strong>Gary Bond</strong> incarne John Grant, un instituteur en quête de repos désirant retrouver sa femme installée à Sydney. Cette dernière s'immiscera dans ses pensées, comme dans celles du spectateur, sous forme de très brefs flashbacks tout au long du film. Contraint de faire une halte dans la ville au doux nom de Bundanyabba, ou "Yabba", c'est bien malgré lui qu'il va se retrouver spectateur autant qu'acteur de la vie locale à base de descente de bières (en quantité industrielle, à donner la nausée au plus endurci des Écossais) et d'un jeu de pari local appelé "Two-up". La bière et le jeu sont au cœur de ce microcosme et représentent la porte d'entrée dans cet enfer à ciel ouvert, c'est par là que la folie va gagner le protagoniste. <strong>Kotcheff</strong> offre alors au spectateur de nouvelles séquences particulièrement inspirées, tant sur le plan technique – certains plans rappellent du <strong>Hitchcock</strong> – que sur la profondeur des personnages. Le rôle de l'officier de police, premier contact de John dans ce monde à la fois accueillant et hostile, est un véritable modèle du genre. <strong>Donald Pleasence </strong>n'est pas en reste dans le rôle d'un médecin alcoolique, apparemment sensé et sain d'esprit, mais au final autant
sinon plus dérangé que le reste de la population locale. </p>
<p><img title="two_up.jpg, mar. 2014" style="margin: 0 auto; display: block;" alt="two_up.jpg" src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/reveil_dans_la_terreur/.two_up_m.jpg" /></p>
<div id="centrage"> <span style="font-size: 9pt;">Magnifique séquence lors d'une partie de "Two-up".<br /></span></div>
<p>Le film fait évidemment penser au classique de <strong>Boorman</strong>, <ins>Délivrance</ins> (pour l'aspect perversion de la nature et du beau), ainsi qu'à celui de <strong>Peckinpah</strong>, <ins>Les Chiens de Paille</ins> (pour l'aspect instinctif de la violence), tous deux sortis un an plus tard, en 1972. On pense également au récent et beaucoup moins réussi – mais correct – <ins>Wolf Creek</ins> réalisé par <strong><span class="st">Greg McLean</span></strong> en 2005.<br />L'originalité et la force de <ins>Wake In Fright</ins> tient à la sobriété de sa mise en scène et son scénario réaliste, dédale haletant d'un instituteur innocent pris dans les rouages d'une communauté et de son mode de vie, accueillant en apparence mais insidieusement malsain. D'abord esclave de son métier (il a contracté un prêt important pour se former et se considère lui même comme "<em>a bonded slave of the Australian Department of Education</em>"), il va se retrouver enchaîné à une ville et à ses habitants, terrifiants. Mais cette terreur n'a rien d'extraordinaire ou de soudain comme c'est souvent le cas dans les productions classiques du genre, elle est ici diffuse et jaillit du quotidien de ces gens victimes d'un ennui des plus profonds, transformés en bêtes sauvages par défaut. La scène de chasse au kangourou, réalisée à partir d'un montage de scènes bien réelles, est à ce titre insoutenable. Inoubliable.<br />Les thèmes connexes au métrage sont très variés et traités avec une finesse très appréciable, en témoignent les scènes de violences (physique, morale, sexuelle) ordinaires et l'irruption inopinée d'un questionnement homosexuel, véritable tabou dans cette contrée reculée. Cette agressivité tout à fait involontaire, empreinte de réalisme et surgissant parfois des sentiments les plus sincères, projette le spectateur qui ose poser son regard sur <ins>Wake In Fright</ins> dans une ambiance exceptionnelle, oppressante, et diablement tenace.</p>
<p><img title="kangourou.png, mar. 2014" style="margin: 0 auto; display: block;" alt="kangourou.png" src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/reveil_dans_la_terreur/.kangourou_m.png" /></p>
<div id="centrage"> <span style="font-size: 9pt;">Venez découvrir l'Australie et ses kangourous pour des parties de chasse inoubliables...<br /></span></div>
<p><span style="font-size: 9pt;">
<a name="noel">(1)</a> N'oublions pas que nous sommes en Australie, dans l'hémisphère Sud. <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Reveil-dans-la-terreur-de-Ted-Kotcheff-1971#noel_back">(retour)</a><br /></span></p>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Reveil-dans-la-terreur-de-Ted-Kotcheff-1971#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/237