lion_en_hiver.jpg, avr. 2021
"A king? Because you put your ass on purple cushions?"

La mise en scène donne le ton assez vite, que ce soit à travers la prédominance des intérieurs, la prolixité des dialogues et la (faible) envergure des scènes de bataille : pour raconter son histoire, Le Lion en hiver opte pour une dimension théâtrale. Le sujet médiéval est à a fois très précis et peu courant à mes yeux de mal-connaisseur : en 1183, le roi Henri II d'Angleterre songe à sa succession. Les intrigues sont denses et entremêlées dans cette chronique shakespearienne, puisqu'il sera question de sa femme Éléonore d'Aquitaine, exilée à Salisbury pour avoir comploté contre le roi, et de leurs trois enfants : Richard (futur Cœur de Lion), l'aîné héritier en droit, Jean le cadet et Geoffroy. Le roi préfère le cadet, la reine préfère l'aîné, ce qui fait de Geoffroy le dindon de la farce. Se rajoute à ces problématiques le fait que la prétendante du futur roi d'Angleterre pour des raisons politiques, Adèle de France aka Alix, est actuellement la maîtresse du roi actuel, et que le frère de cette dernière, le roi de France Philippe II, entend bien foutre le boxon au sein de la famille royale britannique en minant cette succession. Un joyeux bordel, donc.

Dans l'ordre, il y a tout de même : Peter O'Toole, Katharine Hepburn, Anthony Hopkins, John Castle, Nigel Terry, Timothy Dalton. Avec Hopkins et Dalton dans leurs tout premiers rôles, et pas des moindres : Hopkins cœur de lion la brute épaisse et Dalton le fourbe Français sont des personnages très marqués. Tout ce beau monde se retrouve à Noël pour discuter héritage et ça tournera au vinaigre, forcément. On en oublierait presque que le sapin de Noël est légèrement anachronique au XIIe siècle, en avance de 3 ou 4 siècles.

Et la guerre (à l'échelle de la famille, il y a très peu de batailles classiques ici, et celles qui sont présentées sont dérisoires) pour la succession commence très tôt dans le film, très peu de place à la courtoisie dans cette noblesse. La haine et le ressentiment tapissent les murs et semblent ne pas dater d'hier, en témoignent les joutes verbales récurrentes, les piques assassines, et les nombreuses tentatives de manipulation. Le couple royal n'est pas d'une incroyable densité psychologique au sens où il évoluera d'un mépris viscéral et réciproque (chacun essaie de mettre un bâton dans les roues de l'autre) vers un final presque apaisé, même si la résolution du conflit n'aura jamais abouti. Mais leurs personnages sont marquant par leur impétuosité, pas de doute. Un affrontement ouvertement outrancier. Sacrée saillance dans les répliques, comme celle que Hepburn adresse à O'Toole : "I could peel you like a pear and God himself would call it justice!"

otoole_hepburn.jpg, avr. 2021