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Le projet d'autoroute sur la côte ouest de La Réunion.

Dans le Charlie Hebdo de cette semaine, un article plein de réminiscences de mon séjour sur l'île de La Réunion écrit par Fabrice Nicolino, auteur des passionnants Bidoche, l'industrie de la viande menace le monde (2009) et Qui a tué l’écologie ? (2011) (1), tous deux sortis chez Les Liens qui Libèrent (voir le site de l'éditeur). On se situe au cœur des Grands Projets Inutiles Imposés (GPII) du type Notre-Dame-des-Landes, qui ont leur propre site internet (lien) et qui avaient fait l'objet d'un article dans le Diplo d'août 2012 (lire le billet correspondant, ou lire l'article intégral sur le site du Diplo).

À La Réunion, comme on ne sait plus trop comment dilapider l'argent public, les politiques locaux (un certain Didier Robert en tête) et le lobby du BTP (incarné par Bernard Siriex, président de la fédération réunionnaise du BTP) semblent prêts à dépenser entre 1,6 et 3 milliards d'euros pour une route de 12 kilomètres, entre Saint-Denis et La Possession. Tous ceux qui vivent ou ont vécu à La Réunion connaissent les problèmes récurrents de circulation sur l'île, localisés aux abords des deux grandes villes (Saint-Denis au nord et Saint-Pierre au sud) et qui resteront donc grosso merdo inchangés suite à ce projet pharaonique. La principale cause de ces embouteillages : des transports en commun pratiquement inexistants, qui assurent seulement 6% des déplacements aujourd'hui contre 30% il y a une vingtaine d'années.
Jean-Pierre Marchaud (voir son site), écolo réunionnais et l'un des « criminels » dénoncés par l'homme du BTP local, se démène avec une poignée d'autres pour faire capoter ce qu'il appelle « Notre-Dame-du-littoral » et rappelle que, jusqu'en 2007, l'ancien conseil régional envisageait la construction d'une ligne de chemin de fer pour une sorte de tram-train, sur le même tracé que l'actuel projet. Le coût aurait été bien moindre, certes, mais le béton n'aurait pas coulé avec autant d'enthousiasme, pour le plus grand bonheur de Siriex & Cie...

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Jean-Pierre Marchaud, « criminel » selon certains, mais surtout écolo.

Rappelons que La Réunion est une île de 880 000 habitants, l'un des départements français les plus pauvres et les plus endettés, et que 30% de la population est au chômage, avec un pic à 60% chez les jeunes actifs de 15 à 24 ans. Investir une somme aussi colossale pour faire passer les lotos (bagnole, en créole réunionnais) signifie très probablement qu'aucun autre investissement ne sera envisagé, comme ce tram-train qui aurait au passage rendu un immense service aux pauvres, dans cette île où un habitant sur trois n'a pas de voiture.

(1) Écouter à ce sujet l'émission de Mermet consacrée au bouquin de Nicolino : http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=2139. Attention, amateurs du Grenelle de l’environnement, de WWF, de France Nature environnement, de Greenpeace ou encore de la Fondation Nicolas-Hulot : déprime assurée... (retour)