Je suis anarchiste au point de toujours traverser dans les clous pour ne pas avoir à discuter avec la maréchaussée.

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Georges Brassens est l'un des artistes français les plus appréciés. Ses textes demeurent et demeureront — à juste titre — dans l'imaginaire populaire. Cependant, malgré sa célébrité (il serait d'ailleurs bien embêté d'en apprendre l'existence), il n'en reste pas moins fortement méconnu du grand public, qui n'a souvent que l'image répandue du sympathique chanteur amateur de chats. Marc Wilmet nous permet de découvrir une facette intéressante de Brassens, à savoir son amour de l'anarchie et son engagement inébranlable et humaniste pour la liberté.

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Si le livre s'articule autour de trois phases de vie de Brassens (le chroniqueur marginal, le chansonnier déroutant et l'écrivain semi-officiel), il s'attarde plus particulièrement sur son passé de chroniqueur pour Le Libertaire, revue anarchiste de la fin des années 40. Sous le pseudonyme de Geo Cédille, il écrivit en 1947 une dizaine d'articles, commentant l'actualité avec un style déjà plein d'humour et de provocation. Brassens, qui a lu Proudhon, Bakounine et Kropotkine, s'attaque à la religion, à la police (« Les policiers tirent en l'air mais les balles fauchent le peuple », titre une des chroniques de Geo Cédille) et aux diverses personnalités en vue de l'époque, dont « Aragon, dorénavant soumis à la force capitaliste » (Brassens qui par ailleurs connut le succès en chantant le magnifique poème d'Aragon Il n'y a pas d'amour heureux prit alors soin de retirer la dernière strophe qui parle d'amour de la patrie).

Qu'attend la masse pour se soulever ? Le mercantilisme insolent de la guerre et de la paix n'a pas dissuadé les Français de participer au scrutin pour la Constitution de la Quatrième République (13 octobre). Puisse le peuple se réveiller (piller les commerces, rosser les boutiquiers...), prendre conscience de sa force, refuser à l'avenir la domination des riches !

Wilmet (qui est linguiste) s'amuse à disséquer les thèmes évoqués par Brassens, sa poésie, l'évolution de sa pensée et de son style. Jamais Brassens ne sera apparu au lecteur dans une telle globalité, révélant ainsi l'incroyable cohérence de son œuvre, et sa richesse.