vendredi 21 février 2025

Goupi Mains Rouges, de Jacques Becker (1943)

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"Les paysans, tu apprendras à les connaître. Ils ont le respect de l'argent, parce que c'est du travail. La terre est basse, comme on dit."

Certains films français du début des années 40 n'ont décidément pas la même saveur que les autres, il y a comme un ingrédient secret qui leur confère ce petit quelque chose vaguement indéfinissable. L'effet de capsule temporelle est souvent très particulier lui aussi, puisqu'il nous contraint à replonger dans la France vichyste, ce qui est rarement une partie de plaisir — l'exemple le plus célèbre étant probablement la version de Henri-Georges Clouzot avec Le Corbeau, sorti la même année que Goupi mains rouges en 1943.

Chose étonnante (me concernant), ce presque premier long-métrage de Jacques Becker est un film à personnages que je trouve réussi. Pour le dire autrement, il prend la forme d'une chronique familiale mêlant un grand nombre de personnages importants, et il parvient à tisser une intrigue relativement anodine (en apparence au moins) au creux d'une toile assez passionnante, jouissant d'une écriture soignée. En dépit de toutes les rigidités techniques et discursives de la décennie des années 1940, cette histoire de paysans nous projette dans un microcosme rural, un petit village de Charente, et nous force à faire connaissance avec la dizaine de membres que compte la famille Goupi. Un peu comme l'un d'entre eux débarquant de Paris, on se retrouve projeté dans un référentiel un peu barjot, paumé au milieu de tous ces fous.

Car la galerie de personnages est très gratinée, mais sans que les excès de chacun ne soient pénibles : c'est d'ailleurs avec un arrière-plan comique que l'on passe en revue l'ensemble des intéressés, faisant régulièrement oublier les horreurs qui jalonnent une fausse enquête policière. Fausse car il n'y a pas de policier pendant l'essentiel de l'intrigue, et fausse car l'enquête est une sorte de prétexte pour révéler toutes les déviances de la maisonnée. Et on peut dire que les portraits alimentent une composante bien noire de ce film paysan, partagés entre mesquinerie, mensonge, avidité et arrivisme, le tout baignant dans une ambivalence des plus fourbes et teintée d'ironie — les morts ne le sont pas nécessairement, les assassins ne sont pas ceux qu'on croit. Le récit parvient à entremêler à ces retournements de situations de nombreuses trames annexes, des rivalités amoureuses, des pétages de plombs, des révélations très amères, et plus généralement une succession de querelles qui minent le clan familial, pourri par la radinerie et le repli sur soi, pétrifié par l'hypocrisie et les soupçons.

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mercredi 19 février 2025

Hollywoodgate, de Ibrahim Nash’at (2023)

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Le coffret à jouets des talibans à la tête de l'armée de l'air Dans la catégorie "immersion au sein d'une communauté atypique", les images qu'Ibrahim Nash’at a réussi à capturer et monter sur une année au plus près des talibans, suite au retrait militaire états-unien d'Afghanistan, sont  […]

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mardi 18 février 2025

La Sixième Partie du monde (Шестая часть мира, Chestaya tchast mira), de Dziga Vertov (1926)

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Ode à l'aigle kirghiz et au renne cru, à la production agricole et aux ovins qui se baignent La Sixième Partie du monde, en référence à l'étendue de l'Union Soviétique par rapport aux autres territoires de la planète, peut se concevoir de plusieurs façons, selon le degré d'adhésion ou de rejet au  […]

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dimanche 16 février 2025

Terres promises, de Bénédicte Dupré La Tour (2024)

illustration de couverture

Bon sang de bonsoir, quel livre ! Il est bien difficile de croire que Terres Promises est le premier livre de Bénédicte Dupré La Tour tant celui-ci est époustouflant. Sa sœur jumelle, Florence, est dessinatrice de bandes dessinées, peut-être faut-il se pencher sur sa trilogie BD autobiographique  […]

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mercredi 12 février 2025

Quatre Étranges Cavaliers (Silver Lode), de Allan Dwan (1954)

quatre_etranges_cavaliers.jpg, 2025/01/24

"A man’s life can hang on a piece of paper." Il y a un côté presque rassurant, à regarder Silver Lode aujourd'hui dans les conditions médiatiques hystériques actuelles, à cette ère de post-vérité où les faits et les opinions tendent à perdre leurs sens et leurs différences respectives.  […]

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mardi 11 février 2025

The Unstable Object, de Daniel Eisenberg (2011)

unstable_object.jpg, 2025/01/24

Trois objets, trois chaînes, trois ambiances La signification exacte du titre, The Unstable Object, reste quelque peu obscure à la fin du visionnage de ce documentaire qui pose un regard sur trois lieux de travail à travers le monde : d'abord, une usine de montage Volkswagen à Dresden en Allemagne,  […]

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lundi 10 février 2025

Aniki Bóbó, de Manoel de Oliveira (1942)

aniki_bobo_A.jpg, 2025/01/13

Une enfance à Porto, sur les rives du Douro Quel vertige de contempler l'amplitude du cinéma de Manoel de Oliveira, que j'avais à titre personnel découvert par son avant-dernier film de 2011, L'Étrange Affaire Angélica (réalisé à un peu plus de 100 ans, excusez du peu, quelques années avant sa mort  […]

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vendredi 07 février 2025

Nevermore, de William Hjortsberg (1997)

Nevermore est un délicieux polar dont les deux héros sont Sir Arthur Conan Doyle et le maître illusionniste Houdini. William Hjortsberg imagine ces deux copains devenus bon gré mal gré des détectives dans le New York des années 1920. Un tueur en série dans la ville imite les modus operandi des  […]

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