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En Chine, la vie selon Apple
Les villes-ateliers de Foxconn
Jordan Pouille (journaliste, Pékin)

Le géant taïwanais Foxconn, premier fournisseur mondial d'électronique et premier employeur privé en Chine, est désormais à l'étroit dans son bunker géant de Shenzhen Longhua, près de Hong Kong, sur la côte Est du continent asiatique. Jordan Pouille, journaliste à Beijing (Pékin) pour le Diplo, nous entraîne dans un voyage au cœur du Guangdong et du Sichuan, lieux emblématiques du renouveau industriel de la multinationale.

D'une usine à l'autre, d'iPod en MacBook, d'atelier d'assemblage en local de laminage, les produits « made in Apple » trouvent tous leur origine dans ces salles mal ventilées et bruyantes, où la chaleur suffocante et la poussière d'aluminium rythment les journées de millions d'ouvriers chinois. C'est ici, à Longhua, que le fondateur taïwanais de Foxconn, M. Terry Tai-ming Gou, a construit sa première usine chinoise en 1988. Engoncés dans un bunker de trois kilomètres carrés cerné par des dortoirs, trois cent cinquante mille personnes fabriquent jour et nuit les imprimantes HP, les ordinateurs Dell et Acer, les liseuses Kindle d'Amazon, la Playstation de Sony et, bien sûr, tous les produits de la gamme Apple qu'on s'arrache et qu'on consomme frénétiquement à l'autre bout du monde. Face à l'insatiable demande mondiale suscitée par ces derniers, Foxconn a même construit deux usines supplémentaires, l'une entièrement dédiée à l'iPad, dans le Sichuan, et l'autre à l'iPhone, dans le Henan. Chacune emploie environ deux cent mille ouvriers, entassés dans des milliers de chambres – filles et garçons séparés – appartenant à de riches propriétaires locaux. Dormez, braves gens, la pénurie d'objets aussi indispensables à notre quotidien n'est décidément pas pour demain.

« C'est vrai qu'on s'ennuie un peu ici, l'air est pollué, les rues sont sales, il n'y a pas de place pour cultiver son potager et on se sent un peu surveillé avec tous ces gardiens » ose toutefois Mme Jiang, 63 ans, récemment convertie à la vie citadine après avoir laissé derrière elle sa campagne natale. Il faut dire que lorsqu'ils arrivent avec leur baluchon devant l'imposant centre de recrutement, les jeunes migrants découvrent des slogans d'accueil tous plus mirifiques les uns que les autres : « Réaliser ses rêves », « Faire fortune »... tout en précisant, pragmatiques, qu'« il ne faut ni diplôme ni argent pour rejoindre l'entreprise. »

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La photo ci-dessus, prise par Wang Lei en 2010 à Shengzhen, montre un ouvrier de Foxconn fixant une enseigne qui indique « Prenez soin de votre vie. » Quel doux paradoxe...

Dans cet environnement ultra-calibré, des bus relient les ateliers A, B et C aux dortoirs 1, 2 et 3. C'est ce même paysage que l'on achève de façonner dans la banlieue de Chongqing, où Foxconn déménage une partie de son atelier d'imprimantes HP. La production démarre à peine mais, déjà, les bus universitaires ramènent leurs flots d'étudiants réquisitionnés pour un stage obligatoire en usine. Ils rejoindront sans doute, d'ici quelques années, ces dix mille ouvriers qui dorment tous dans les mêmes chambres, avec huit lits numérotés et huit tabourets. D'ores et déjà, ils savent que leur travail sera identique : ils assembleront chacun six cent imprimantes par jour, en espérant que le salaire suivra. Longue vie à Apple...


Des clubs de football égaux, mais pas trop
Entre idéal sportif et loi du plus fort
David Garcia (journaliste)

Article fort intéressant sur la situation des grands clubs de foot à travers le monde, où l'on apprend que le surendettement est la norme dans ces milieux qui sacralisent l'argent. Malgré le rappel à l'ordre récent signifié par l'UEFA (union des associations européennes de football), le « fair-play financier » prôné par Michel Platini, fraîchement réélu à sa présidence, ne semble pas inquiéter l'élite des clubs du continent européen... Aussi, pour se consoler, on peut toujours regarder le match Allemagne - Grèce revisité par les Monty Python, dans un registre philosophico-sportif d'une autre dimension...


À écouter du lundi au vendredi entre 15 et 16 heures : Là-bas si j'y suis, l'émission de Daniel Mermet sur France Inter, consacrée au Diplo une fois par mois. Celle de juin est accessible sur http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=2487.