Je m'attarde

Une journée dans la vie d'une adolescente des classes aisées en passe d'avoir son premier rapport sexuel : tel pourrait être le résumé de Les Adolescentes — un titre français un peu hors sentier, qui ne reflète pas du tout la tonalité du titre italien (I Dolci inganni) se traduisant par les douces déceptions / tromperies. Dans une thématique proche d'un autre film italien des années 60 vu récemment (Je la connaissais bien, 1965, Antonio Pietrangeli), Alberto Lattuada suit la trajectoire de Francesca, une jeune fille de 17 ans, du lever au coucher. Le film commence par son émergence d'un rêve qu'on imagine érotique, et se terminera par un regard caméra digne de celui de Monika (1953) orchestré par Bergman, témoignant de manière ambivalente soit une assurance froide, soit une interrogation troublée.

Tout commence par une petite fugue de l'école, pour aller rendre visite à un ami de ses parents, un architecte qui a 20 ans de plus qu'elle : ce mouvement se fera dans une ascension géographique constante, de la rue jusqu'à la terrasse supérieure, à travers ascenseur et escaliers. Une attirance qui l'habitera toute la journée, qui ne la lâchera pas, elle qui de rencontres en rencontres ne parviendra pas à se départir de cette idée qui penche et explore du côté du monde adulte.

À la clé, il faut s'attendre à une douce désillusion, car Francesca est une rêveuse mélancolique qui, le soir venu, devra dire adieu à son enfance, en quelque sorte. Une réflexion qui sera initiée dans la voiture avec son amant, par ce solide silence sur le chemin du retour vers le domicile parental. La beauté de Catherine Spaak, particulièrement photogénique, aide beaucoup dans le registre de la sensualité, il faut avouer — dans ce film italien dont les rôles principaux sont curieusement occupés par des acteurs français. Dans une ambiance proche d'un Antonioni, sur le thème de l'errance, du désir féminin, et de l'identité en construction, un portrait élégant orienté vers une inquiétude existentielle se dessine peu à peu.