
Du cinéma très pragmatique des années 50 françaises, un travail d'artisan plus que d'artiste pour au service d'un microcosme un peu particulier. Un peu comme Raymond Rouleau recréait deux ans plus tôt le village de Salem au XVIIe siècle dans Les Sorcières de Salem (1957), Charles Brabant place son récit sûr une île désolée du Finistère, au milieu du XIXe siècle, en pleine famine. L'heure n'est plus à l'ethnofiction côtière ou à la poésie îlienne chères à Flaherty et Epstein dans les années 20 et 30 : dans Les Naufrageurs, il est bien question d'une île, Blaz-Mor, mais le tournage aura lieu sur la terre ferme et sur la côte du continent. Et ce sont des acteurs tout ce qu'il y a de professionnel pour donner chair à cette histoire, qui semble héritée du Moyen Âge, avec une sauvageonne, un chef de village, une famine, des pillages, et des couteaux longs comme le bras.
Tout partira d'un fanal brisé par une personne du village, fanal qui tenait lieu de phare pour les embarcations évoluant dans les eaux dangereuses du coin. Il en découlera un naufrage largement prémédité, et une aubaine pour tout le village qui pourra apaiser sa faim et sa soif avec les victuailles qui emplissaient les cales du navire. Mais il y a eu également un massacre de survivants, et lorsque le commissaire et le curé débarquent sur l'île, on sent bien que la tension sourde qui s'installe est là pour durer.
On le comprend assez vite, on n'est pas vraiment dans le registre comique de l'île écossaise en folie du type Whisky à gogo, dans lequel les habitants tombent sur un navire échoué (mais pas par leur soin, pour leur défense) et dont les cales regorgeaient du précieux liquide. Ici, tout le monde conserve un sérieux un peu trop rigide, de Henri Vidal le courageux à Charles Vanel le vieux chef en passant par Dany Carrel la belle villageoise qui s'éprendra d'un beau marin allemand (particulièrement à l'aise en français, m'enfin bon). Pas mal d'archétypes, à commencer par la figure de paria qui vit recluse loin de tous, mais qui se trouvent à mes yeux bien contrebalancés par la photogénie et l'atmosphère des lieux.




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